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« CONVERTISSEZ-VOUS... » (Carême 1980)

Publier le 15 février 1980

Introduction


Il est arrivé, le temps de Carême : le temps du recueillement le temps de la réflexion, le temps de méditation et de prière, le temps du repentir, de la conversion et de la réconciliation.

Nous devons nous recueillir et réfléchir sur notre vie passée, sur notre vie présente et faire le point. Nous devons nous examiner chacun et nous poser des questions sur notre conduite, notre emportement vis-à-vis de nous-mêmes et des autres, sur ce que nous avons fait soit individuellement, soit avec les autres et sur la valeur de nos actes.

Chaque jour, en effet, nous agissons faisant le bien et le mal, et peut-être plus le mal que le bien. Or tout le monde en convient : le mal est horrible et haïssable dans la vie de l’homme, ce mal que nous appelons “péché” dans notre vocabulaire de chrétien.

Le Carême est pour nous chrétiens le temps favorable et béni de nous détourner du mal ou du péché et de changer de conduite pour un renouveau spirituel et moral, comme nous y exhorte le Seigneur Dieu par la voix du prophète : “Rejetez loin de vous les transgressions que vous avez commises, et faites-vous un cœur nouveau et un esprit nouveau” (Ez.l8, 31).
 

1. La réalité du péché


Mais qu’est-ce que le péché ? Ce mot a trop vieilli ; le sens en est émoussé : il ne dit presque plus grand-chose aux hommes de notre temps et n’inquiète plus les consciences. Et pourtant les réalités du péché sont là. Même s’il n’inquiète plus les consciences, le péché est devenu comme une tumeur maligne qui ravage le corps et dont les conséquences sont terrifiantes. Pour s’en rendre compte, il faut en avoir subi les effets.

Quand on a été volé et battu injustement ; quand on a été trahi et livré par un ami, un parent, sa femme ou son propre enfant ; quand on eu son épouse détournée par un copain, ou son mari ravi par une camarade, quand on a subi injustement des sévisses, de tortures et la prison à cause des calomnies ou des allégations mensongères d’hommes iniques, on comprend alors mieux la laideur et la nocivité du péché, et on l’abhorre.
D’une façon ou d’une autre, nous en sommes tous victimes, victimes du péché avec ses conséquences. Nous assistons chaque jour à des scènes horribles : on ment, on calomnie, on blasphème, on excite à la violence, on tue, on avorte, on divorce comme en jouant ; les jeunes prennent plaisir à avaler des comprimés de Nivaquine et de se suicider pour rien, sans avoir pitié de leurs parents qui ont ruiné leur santé et leur fortune pour les élever ; sous nos yeux se déroulent contre nos frères ou contre nous-mêmes des trafics d’intrigues et d’injustices criardes. Tout cela est monnaie courante, c’est la pratique de tous les jours, c’est la vie de notre temps...

Quelles sont donc vos réactions devant ces faits et ces actes ? Cela vous coupe le souffle ! Un cri vous monte au cœur : « C’est abominable ! C’est détestable ! C’est déshonorant ! C’est malheureux ! C’est inhumain ! ». Le péché, c’est cela.

Ils sont abominables et détestables, les effets du péché ! Vous réagissez, vous protestez parce que vous en avez subi les conséquences ? Mais vous, pourquoi le feriez-vous contre le prochain, contre votre frère que le Seigneur Jésus-Christ a ordonné d’aimer comme soi-même ? Ce péché qui lui cause du tort et offense Dieu, la conscience chrétienne doit le détester et le réprouver.
 

2. Effort de conversion


Pendant le Carême, repentons-nous profondément de tous les péchés que nous commettons si souvent contre Dieu et contre nos frères humains. Efforçons-nous alors de faire le bien qui nous valorise et nous élève.

“Convertissez-vous et croyez à l’Évangile” (Mc 1, 15). Se repentir et se détourner résolument du mal pour pratiquer le bien, c’est se convertir. Sans le repentir et une réelle conversion, il n’est as d’authentique Carême. Pour y parvenir, méditons plus intensément la Parole de Dieu qui élève et purifie notre âme et vivons dans la ferveur de la prière.
 

3. Raisons de notre conversion


Plus que jamais nous avons besoin de nous recueillir et de réfléchir sur notre vie, nous avons intérêt à nous repentir et à nous détourner du mal, nous avons tout avantage à méditer profondément la Parole de vérité et de vie, de prier avec beaucoup d’ardeur et de ferveur, pour nous maintenir debout au milieu des combats continuels et serrés que nous livre l’adversaire, pour échapper aux dangers visibles et invisibles qui nous menacent de toutes parts, et triompher des pressions de tous genres auxquelles nous sommes soumis chaque jour. Cet effort de conversion est nécessaire et capital si nous voulons conserver notre foi chrétienne et survivre, et si nous voulons assurer à notre société un climat sain de bien-être, de bonheur et de paix.
 

4. Les thèmes de prédication


Ce que j’ai constaté et vécu au cours de mes années sacerdotales, j’en ai fait part au peuple chrétien depuis que par la grâce de Dieu, j’ai reçu mission de parler officiellement à tout le monde. Depuis ma nomination à la tête de l’Archidiocèse de Brazzaville, j’ai fait connaître partout, aux communautés chrétiennes, les points préoccupants de notre Église.

A maintes reprises, j’ai insisté sur la nécessité de la prière pour nous maintenir dans la foi, échapper aux dangers de la vie et survivre. J’ai parlé de l’éveil des vocations sacerdotales et religieuses afin que nous ayons des prêtres du pays en nombre suffisant pou accélérer et approfondir le processus de l’Évangélisation dans notre pays, gage d’authentique libération et de vrai bonheur. J’ai prôné, la suite du Concile Vatican II, le développement de l’apostolat des laïcs pour activer l’expansion de la Bonne Nouvelle dans toutes les couches de la société, dans tous les milieux de vie ; j’ai enfin exhorté longuement et avec beaucoup de passion à l’amour du prochain, à la charité fraternelle enseignée et recommandée par le Christ lui-même, cette charité qui réalise dans notre vie l’union des cœurs, la justice, la paix, la joie et le bonheur de tous.

Tous les thèmes de ma prédication, mes divers contacts avec le peuple croyant, mes activités pastorales des premiers moments ont eu pour but unique : le renouvellement intérieur et extérieur de notre communauté diocésaine, la sanctification de tous ses membres : prêtres, religieux, religieuses et fidèles laïcs. Que tous ces thèmes soient les principales intentions de prières pendant le Carême !
 

5. Rendre très sérieux ce Carême


Voilà pourquoi, je vous exhorte tous à rendre très sérieux le Carême de cette année 1980, et d’en faire un temps idéal et propice de grande rénovation spirituelle et morale. Que chacun s’efforce donc de se réformer réellement, de changer de conduite et devenir meilleur, c’est-à-dire plus chrétien et plus humain, en pratiquant les œuvres de pénitence suivant la recommandation du Seigneur : “Revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les pleurs et les cris de deuil, déchirez vos cœurs...” (Jl. 2, 12).

“Lavez-vous ! Purifiez-vous ! Ôtez votre méchanceté de ma vue ! Cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien ! Recherchez le droit, redressez le violent ; faites justice à l’orphelin, plaidez pour la veuve... (Is. 1, 16-17).
 

6. La Confession et l’Eucharistie : moyen puissant et efficace de conversion et de perfection


C’est par des actes concrets que nous accompliront notre Carême, des actes intérieurs et extérieurs, individuels et collectifs ou communautaires. La pratique des sacrements de Pénitence et de l’Eucharistie avec la prière et la méditation de la Parole de Dieu, est le moyen le plus puissant le plus efficace de réaliser notre purification, notre conversion et notre perfection en Carême.

Tout chrétien doit aspirer ardemment à se libérer la conscience par une bonne confession individuelle et sacramentelle. Comme l’affirme le Rituel : “La confession individuelle et intégrale ainsi que l’absolution du prêtre demeure l’unique moyen ordinaire par lequel les fidèles sont réconciliés avec Dieu et avec l’Église, si aucune impossibilité physique ou morale ne met obstacle à ce genre de confession (Rit. pénit. Intr. n° 31).
 

7. De fausses conceptions sur la Confession et l’Eucharistie


Ils sont donc dans l’erreur ceux qui déprécient la confession sacramentelle ou qui la remplacent par “une confession mentale à Dieu”, ou par un simple “acte de contrition parfaite”. Car un ace de contrition parfaite n’est qu’un moyen possible de purification et de réconciliation probable, tandis que la confession rituelle avec l’absolution est un sacrement dont l’efficacité est certaine, sans cette certitude morale de se trouver en état de pureté de cœur, grâce à une bonne confession sacramentelle, la réception de 1’Eucharistie éveillerait souvent de sérieux doutes de conscience. Car : “Nous ne pourrons jamais oublier, dit le Pape Jean Paul II, ces parole de saint Paul : Que chacun s’éprouve donc lui-même et qu’il mange de ce pain et qu’il boive de ce calice... Celui qui mange et boit indignement le corps et le sang du Christ, mange et boit sa propre condamnation, s’il n’y discerne le corps...” (1Cor. 11, 28-29). “Cette exhortation de l’Apôtre, poursuit le Pape, indique au moins indirectement un lien étroit qui existe entre l’Eucharistie et la Pénitence ou la confession sacramentelle” (Redempt. Hornin., p.87).

Tout ceci, pour dire que la confession sacramentelle est nécessaire si l’on veut s’approcher plus sûrement et dignement de l’Eucharistie, signe d’amour, d’unité, de perfection chrétienne et gage de salut ; mais aussi pour réprouver la coutume de ceux qui communient très souvent, sans vouloir se confesser, quand bien même ils se reprocheraient de fautes graves.
 

8. Leurs conséquences dans la communauté


Une telle mentalité ne peut que fausser les consciences chrétiennes et laisser croupir le monde dans le mal. Pourquoi étonner alors qu’il y ait tant de dévergondage dans notre société, tant de concubinages, de débauches et de divorces, tant d’avortements et de suicides, tant de délinquance et de vols, tous ces maux, tous ces désordres dont tout le monde souffre et se plaint ? Comment voulez-vous que notre monde se porte bien quand nous qui sommes “le sel de la terre” et “la lumière du monde” nous nous affadissons et nous nous étouffons sous les ordures du péché ?

Ce n’est sûrement pas dans des cœurs encrassés et insouciants, dans des foyers disloqués et des familles déchirées par la haine, la dispute et la discorde, des communautés embourbées dars le mensonge, la calomnie et l’égoïsme, menant une vie chrétienne superficielle, formaliste et routinière, ou dans cette ambiance érotique, sans-gêne et contestataire, que s’éveilleront et s’épanouiront les vocations sacerdotales et religieuses dont nous avons tant besoin.

Le mal engendre le mal ; le péché détruit l’amour. Sans la pureté de cœur et sans amour, nous sommes incapables de perfection, partant incapables de transformer la société et de la sanctifier.
 

Conclusion


Ainsi, je demande à toutes les Paroisses, à toutes les Communautés religieuses et aux Maisons de formation d’organiser des journées ou des moments de prière intense, de favoriser les exercices de Carême en privé et en commun : chemin de la croix, causeries spirituelles, méditation de la passion de Jésus-Christ, retraites ou récollections, cérémonies pénitentielles et de recommander à tous ceux qui le peuvent la confession individuelle, la communion fréquente ou de suggérer d’autres pratiques que l’on jugera convenables pour une meilleure préparation aux fêtes pascales.

Comme je l’avais annoncé à la réunion des responsables des mouvements d’apostolat, les activités de Carême se dérouleront principalement dans le cadre de chaque paroisse et de chaque communauté. A chaque Paroisse de prévoir et d’organiser les exercices qu’il convient de faire avec ses différentes unités pastorales et liturgiques ou avec la Communauté tout entière.

Que les aumôniers des mouvements d’apostolat ou de spiritualité se conforment a cette consigne et se mettent a la disposition des paroisses pour aider les différents groupes à vivre le Carême dans leur famille paroissiale et à mieux se préparer à la Fête de la Résurrection.

Soyons tous unis dans une fervente communion d’intention et de prière pendant tout le temps de Carême, afin que Pâques soit, pour nous tous, la Fête d’une réelle résurrection spirituelle et morale et du renouveau de toute notre communauté diocésaine.

Que Dieu bénisse et sanctifie nos œuvres de Carême et que Marie nous assiste dans cette voie de perfection et de salut !

 

Monseigneur Barthélémy Batantu, Archevêque de Brazzaville,
Carême 1980

 


 

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