RECOMMANDATION A MÉDITER LE MESSAGE DU SAINT PÈRE (Carême 1982)
Publier le 6 mars 1982
Le Secrétariat de la Conférence Épiscopale du Congo a diffusé, il y a quelques semaines, le message du Saint Père pour le Carême 1982. Le journal “La Semaine Africaine” a déjà publié ce message.
Je recommande à la méditation personnelle et communautaire et même à l’étude de ce texte du pape : « Qui est mon prochain » ? (Lc 10, 29). Cette interrogation qui ouvre le texte du Saint Père et qui pourrait en être le titre, donne l’essentiel de ce qui est proposé : s’interroger sur l’amour qu’on a sur Dieu et le prochain et sur ce qu’on en fait. Le Christ qui s’est fait le Bon Samaritain de l’humanité reste un appel à notre engagement.
Pendant le Carême, chacun doit se mettre en route pour la purification et la pénitence, en supprimant toute distance entre Dieu et nous, entre nous et les autres. Quitter “tout ce qui fait que nous n’aimons pas encore Dieu de toute notre âme, de toute notre force”. Envers les autres hommes, quitter “le stade, important mais insuffisant, de la réflexion, des déclarations ou protestations”, pour nous faire vraiment le Bon Samaritain des blessés et des spoliés de notre société.
Le Carême, ce temps liturgique de pénitence et de conversion que l’Église nous donne est déjà là pour notre « apprentissage » à imiter le Christ, Bon Samaritain de l’humanité. Le Saint Père ensuite des orientations pratiques :
- Se laisser transformer par l’Esprit de Dieu, esprit d’amour et de partage ;
- Participer activement à la vie de L’Église locale ;
- Faire des collectes pour aider, par le partage, ceux qui sont dans le besoin.
Ils sont nombreux ceux-là qui sont “notre prochain”, et qui attendent une aide, quelle qu’elle soit. Tout chrétien est convié à la charité vis-à-vis de toute misère. Le Saint Père dit qu’il faut nous faire vraiment pauvres avec ceux qui sont démunis de tout.
J’exhorte toutes les communautés chrétiennes à penser, dans leurs collectes de Carême, aux maisons de formation religieuse (séminaires). D’autres nécessités nous pressent aussi. Comment aider les filles mères très nombreuses et en difficulté dans notre société ? Comment aider les jeunes qui se droguent, les prisonniers, les malades abandonnés ?
Le Carême doit nous aider à chercher des solutions directes ou indirectes à toutes ces questions d’intérêt vital.
Qui est mon prochain ? Le chrétien n’a pas le droit de rester indifférent à toute misère humaine. Avec le Christ, il faut secourir, guérir et sauver l’homme.
“Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de tout ton esprit ; et ton prochain comme toi-même” (Lc 10, 27).
Message du Saint Père
Chers Fils et chères Filles,
« Qui est mon prochain » ? (Lc 10, 29).
Vous rappelez : c’est par la parabole du Bon Samaritain que Jésus répond à cette question d’un légiste qui vient de confesser ce qu’il lit dans la Loi : “Tu aimeras le Seigneurs ton Dieu, de tout ton cœur de toute ton âme, de toute ta force et de tout ton esprit ; et ton prochain comme toi-même”. (Lc. 10, 27-28)
Le Bon Samaritain, c’est d’abord le Christ ; c’est Lui qui le premier s’est approché de nous, a fait de nous son prochain, pour nous secourir, nous guérir et nous sauver : “Il s’est anéantit lui-même, prenant la condition d’esclave et devenant semblable aux hommes. S’étant comporté comme un homme, il s’humilia plus encore, obéissant jusqu’à la mort et à la mort sur une croix” (Ph 2, 7-8).
S’il y a encore quelque distance entre Dieu et nous, cela ne peut venir que de nous, des obstacles que nous mettons à ce rapprochement : le péché qui est en notre cœur, les injustices que nous commettons, la haine et les désunions que nous entretenons, tout ce qui fait que nous n’aimons pas encore Dieu de toute notre âme, de toute notre force. Le temps du Carême est le temps privilégié de la purification et de la pénitence pour laisser le Sauveur faire de nous son prochain et nous sauver par son Amour.
Le second commandement est semblable au premier (Mt 22, 39) et en est indissociable. Nous aimons les autres, avec l’Amour même que Dieu déverse en nos cœurs et avec lequel il les aime lui-même. Là aussi, que d’obstacles pour faire de l’autre notre prochain : nous n’aimons pas assez Dieu et nos frères. Pourquoi avons-nous tant de difficultés encore à quitter le stade, important mais insuffisant, de la réflexion, des déclarations ou des protestations, pour nous faire vraiment immigrés avec les immigrés, réfugiés avec les réfugiés, pauvres avec ceux qui sont démunis de tout ?
Le temps liturgique du Carême nous est procuré en Église et par l’Église pour nous purifier du reste d’égoïsme, d’attachement excessif à des biens, matériels ou autres, qui nous tiennent à distance de ceux qui ont des droits sur nous : principalement, ceux qui, physiquement proches ou éloignés de nous, n’ont pas la possibilité de vivre dans la dignité leur vie d’hommes et de femmes, créés par Dieu à son image et ressemblance.
Laissez-vous donc pénétrer par l’esprit de pénitence et de conversion, qui est l’esprit d’amour et de partage ; à l’imitation du Christ, faites-vous proches des spoliés et des blessés, de ceux que le monde ignore ou rejette. Participez à tout ce qui se fait dans votre Église locale pour que les chrétiens et tous les hommes de bonne volonté procurent à chacun de leurs frères les moyens, même matériels, de vivre dignement, de prendre eux-mêmes en charge leur promotion humaine et spirituelle et celle de leur famille.
Que les collectes de Carême, même dans les pays pauvres, vous permettent d’aider, par le partage, les Églises locales de pays encore plus défavorisés à remplir leur mission de Bons Samaritains auprès de ceux dont elles sont directement responsables : les pauvres de chez elles, ceux qui manquent de nourriture, ceux qui sont victimes de dénis de justice, ceux qui ne peuvent pas encore être les responsables de leur propre développement et de celui de leurs communautés humaines.
Pénitence, conversion, tel est le chemin, non pas triste, mais libérateur, de notre temps de Carême.
Et si vous vous posez encore la question : « Qui est mon prochain » ? Vous lirez la réponse sur le visage du Ressuscite et vous l’entendrez de ses lèvres : En vérité, je vous le dis, dans la mesure où vous l’avez fait à l’un des plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait” (Mt 25, 40)
Monseigneur Barthélémy Batantu, Archevêque de Brazzaville,
Carême 1982
Brazzaville, le 06 Mars 1982