DISCOURE DU DEUXIÈME SECRÉTAIRE DE LA COMMISSION DIOCÉSAINE DE LA PASTORALE À LA SESSION PASTORALE PRÉCÉDANT L’OUVERTURE DE L’ANNÉE PASTORALE 2016-2017
Publier le 10 octobre 2016, par
Lecture de l’Exhortation Apostolique Post-synodale "Amoris Laetitia" du Pape François
- Excellence, Monseigneur Anatole MILANDOU, Archevêque de Brazzaville,
- Monsieur le Vicaire Général,
- Monsieur le Vicaire Judiciaire,
- Monsieur le Vicaire Épiscopal, chargé de la vie consacrée,
- Messieurs les Recteurs des différentes Maisons de Formation,
- Messieurs les Curés Doyens,
- Chers Aînés et Frères dans le Sacerdoce,
- Chers Religieux et Religieuses,
- Messieurs et Dames les Membres du BEDAL,
- Chers Responsables Diocésains des Mouvements d’Apostolat,
- Chers Frères et Sœurs en Christ !
0. État de la question
Le point de départ de notre exposé est le numéro 5 de l’Exhortation apostolique post-synodale de Sa Sainteté le Pape François Amoris Laetitia. Qu’il nous soit permis de reprendre en extension ce numéro afin d’en découvrir la portée et surtout de poser les bases de notre exposé : « Cette Exhortation acquiert un sens spécial dans le contexte de cette Année Jubilaire de la Miséricorde. En premier lieu, parce que je la considère comme une proposition aux familles chrétiennes, qui les stimule à valoriser les dons du mariage et de la famille, et à garder un amour fort et nourri de valeurs, telles que la générosité, l’engagement, la fidélité ou la patience. En second lieu, parce qu’elle vise à encourager chacun à être un signe de miséricorde et de proximité là où la vie familiale ne se réalise pas parfaitement ou ne se déroule pas dans la paix et la joie ».
Le numéro 96 du Compendium de la Doctrine Sociale de l’Église nous renseigne que la Constitution pastorale « Gaudium et spes » du Concile Vatican II constitue une réponse significative de l’Église aux attentes du monde contemporain. Dans cette constitution, « en syntonie avec le renouveau ecclésiologique, se reflète une nouvelle conception de la communauté des croyants du peuple de Dieu.
La Constitution conciliaire a ainsi suscité un nouvel intérêt pour la doctrine contenue dans les documents précédents au sujet du témoignage et de la vie des chrétiens comme voies authentiques pour rendre visible la présence de Dieu dans le monde. Gaudimet spes trace le visage d’une Église « intimement solidaire du genre humain et de son histoire », qui chemine avec toute l’humanité et qui est sujette, avec le monde, au même sort terrestre, tout en étant « le ferment et, pour ainsi dire, l’âme de la société humaine appelée à être renouvelée dans le Christ et transformée en famille de Dieu ».
C’est ainsi que lors de son homélie prononcée à l’occasion de l’ouverture de la deuxième assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, le 04 octobre 2009, le Pape Émérite Benoit XVI s’exprimait en ces termes : « Par son action d’évangélisation et de promotion humaine, l’Église peut certainement apporter en Afrique une grande contribution à toute la société, qui connait malheureusement dans plusieurs pays la pauvreté, les injustices, les violences et les guerres. La vocation de l’Église, communauté de personnes réconciliées avec Dieu et entre elles, est d’être prophétie et ferment de réconciliation entre les différents groupes ethniques, linguistiques et aussi religieux, à l’intérieur de chaque nation et sur tout le continent. La réconciliation, don de Dieu que les hommes doivent implorer et accueillir, est un fondement indispensable pour le progrès authentique des hommes et de la société, selon le projet de justice voulu par Dieu… »
Dans cette optique, nous pouvons comprendre l’énoncé de notre exposé : « Annoncer la joie de la Miséricorde : principale mission de la famille aujourd’hui ». Puisque l’année passée, l’Église domestique, c’est-à-dire la famille, était invitée à vivre et à annoncer la miséricorde, nous comprenons d’ores et déjà qu’à l’orée de cette nouvelle Année pastorale, la mission à elle assignée est d’annoncer la joie de la Miséricorde, d’annoncer la joie de l’Amour, d’annoncer la joie d’appartenir à Dieu et à son Saint Nom. Nous allons répondre à une question : comment la famille peut-elle annoncer la joie de la Miséricorde ? Trois temps forts vont constituer l’essentiel de notre exposé : d’abord, la famille doit prêcher la miséricorde ; ensuite, la famille doit célébrer la miséricorde ; enfin, la famille doit pratiquer la miséricorde. Venons-en à l’évidence.
1. La famille doit prêcher la miséricorde
Dans son ouvrage intitulé La Miséricorde, notion fondamentale de l’Évangile, clé de la vie chrétienne, Son Éminence Walter Cardinal Kasper estime que « le premier devoir de l’Église est d’annoncer le message de la miséricorde ». Et la famille, en tant qu’Église domestique a de ce fait comme première mission, d’annoncer la miséricorde. Dans une société où tant de gens vivent comme si Dieu n’existait pas, la famille chrétienne doit absolument éviter de se laisser reléguer sur des voies de garage, loin du théâtre des événements du monde. Il lui faut pénétrer au cœur du message évangélique et replacer au centre l’annonce de la miséricorde divine.
Il ne s’agit donc pas d’annoncer un Dieu fade, flou et vague, promoteur et initiateur de la quincaillerie théologique exposée sur le marché des illusions et de la facilité, Dieu d’une religion universelle ou encore un Dieu purement abstrait, ni de parler d’un « bon Dieu » inoffensif et banal, et encore moins de faire peur aux gens en leur présentant un Dieu juge et vengeur. À travers la prière en famille, les différents membres de cette entité sociale peuvent se servir des Psaumes pour chanter, annoncer et proclamer la miséricorde de Dieu qui est inépuisable, « Dieu, Père de tendresse, de qui vient tout réconfort » (2 Co 1, 3), riche en miséricorde (Ep 2, 4).
Pour prêcher la miséricorde, la famille mettra au cœur de son activité spirituelle, humaine, sociale, la Parole de Dieu comme son humus nourricier et l’âme de toute son action. La famille doit montrer que les miséricordes de Dieu s’adressent à nous et que l’histoire du salut s’accomplit pour nous, auditeurs et lecteurs d’aujourd’hui (Lc 4,21).
2. La famille doit célébrer la miséricorde
Un document du Conseil Pontifical pour la Promotion de la Nouvelle Évangélisation nous sert de canevas pour inviter la famille chrétienne à célébrer la miséricorde. Il est intitulé Célébrer la miséricorde. À la page 25, nous pouvons lire ceci : « Les pasteurs et les ministres en général doivent veiller, dans la célébration des sacrements, à ce que transparaissent dans les paroles et les gestes suggérés par la liturgie, la miséricorde et la sollicitude du Père pour chacun de ses enfants, telles qu’exprimées par le don de la grâce sacramentelle. Cette dimension est davantage présente dans certains sacrements. L’attention se porte évidemment, en plus de l’Eucharistie, sur la célébration du Baptême, de la Réconciliation, de l’Onction des malades ».
Les familles devront davantage prendre conscience que le baptême introduit le baptisé dans la communion de l’Église en tant que communauté de vie et d’amour. Puisqu’il accorde le pardon des péchés (cf. Ap 2, 38 ; 1 Co 6, 11 ; Ep1, 7 ; Col 1,14), il est le sacrement de la miséricorde de Dieu. Il en va de même pour l’onction des malades (Jc 5,15). À chaque Eucharistie, la puissance de la miséricorde divine – venant du sang du Seigneur, versé sur la croix (Mt 26,23) – est agissante et pardonne les péchés. Ainsi la participation à l’Eucharistie nous obtient le pardon des fautes quotidiennes. Elle est, selon le mot bien connu de Saint Augustin, le sacrement de l’unité et de l’amour, qui nous unit très profondément à Jésus-Christ et les uns aux autres et par lequel nous sommes envoyés dans le monde au service de l’amour et de la miséricorde.
3. La famille doit pratiquer la miséricorde
C’est dans la praxis pastorale et caritative que se pratique la miséricorde comme mission primordiale de la famille. Cette pastorale ne peut se confondre avec une pseudo-miséricorde, c’est-à-dire une avec une praxis pastorale de complaisance et d’un christianisme light et bon marché, qui dispense de la conversion. Et tout au long de cette Année jubilaire de la Miséricorde, nous parlons des œuvres de la Miséricorde. La Tradition de l’Église en relevait déjà plusieurs et nous ne pouvons que nous émerveiller devant leur actualité de nos jours : « donner à manger et à boire nous appelle à la justice dans un monde dans lequel les ressources de la vie sont distribuées d’une façon très injuste ; accueillir les étrangers devient une question de conscience face à des millions de réfugiés, question qui aujourd’hui est signe des temps ; il est de plus en plus important de visiter les malades et les personnes âgées, dans une société où ne compte souvent que celui qui est jeune, qui est sain et fort et qui a réussi, alors que dans notre société, nous avons de plus en plus de personnes âgées qui restent seules et qui parfois sont taxées de sorcellerie soit à cause de leur calvitie soit à cause de leurs cheveux blancs ; libérer les prisonniers signifie améliorer et humaniser la situation des prisonniers et s’engager pour ceux qui sont en prison injustement ».
Conclusion
La miséricorde est l’expression l’essence divine. La miséricorde, voilà ce qui le distingue complètement des hommes et l’élève au-dessus de tout l’humain. La miséricorde de Dieu apparaît de la manière la plus éclatante dans l’incarnation du Fils et dans sa passion : « Dieu est venu spécialement à notre rencontre, à la rencontre de la famille humaine, par la mission de son Fils unique, qui s’est anéanti et est devenu homme jusqu’à la mort sur la croix. Le crucifix est l’image concrète de la miséricorde de Dieu et nous le voyons en tous ceux qui sont dans le besoin ».
« Famille, deviens ce que tu es : le sacrement de la miséricorde ! »
Abbé Stein Picot BILOU
Deuxième secrétaire de la commission Diocésaine de la pastorale