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HOMÉLIE PRONONCÉE EN LA FÊTE DE SAINT BARTHÉLEMY

Publier le 27 août 2019



HOMÉLIE PRONONCÉE EN LA FÊTE DE SAINT BARTHÉLEMY, A L’OCCASION DES 40 ANS D’EXISTENCE DES CARMÉLITES AU CONGO BRAZZAVILLE

Frères et Sœurs en Christ,

C’est avec une réelle et sincère joie que nous nous retrouvons ici autour de nos Sœurs Carmélites pour fêter les 40 ans de la fondation de ce monastère « Notre Dame du Mont Carmel ». En réalité, c’est depuis 44 ans que les deux premières Carmélites arrivèrent à Brazzaville.

En effet, quand Mgr Théophile MBEMBA Archevêque de Brazzaville et son Coadjuteur Mgr Émile BIAYENDA, font appel aux Carmels de France pour une présence contemplative, dans leur diocèse, cet appel retentit fortement dans les cœurs de deux sœurs : les Sœurs Gisèle du Carmel de Tours et Michelle du Carmel de Verdun. Seulement cette implantation sera vue comme impossible. Car, la formation d’un Carmel n’est rendue possible que par la présence de huit sœurs. Et pourtant, ce Carmel du Congo, notre Carmel, fera exception à la règle lorsqu’en 1974 le Père Finian Monahan, alors Préposé-Général, déclare avec confiance aux sœurs ceci : « qu’elles aillent et nous verrons ». C’est alors que le 21 juillet 1974, les deux sœurs arrivèrent à Brazzaville. C’était le début d’une aventure de foi et d’espérance pour les sœurs Gisèle et Michelle qui verront leur Carmel prendre forme au cœur de l’Église du Congo de façon lente et silencieuse avec l’appui d’un grand nombre de personnalités et individualités de l’Église.

Après la mort du Cardinal avec qui, sœurs Gisèle et Michelle, ont cheminé pas à pas vers la fondation de ce monastère, de 1974 à 1977, les deux sœurs après un temps de méditation, de réflexion et de partages en France, décidèrent de s’installer définitivement au Congo. Cette fois-ci, en compagnie de Sr Chantal du Carmel de Troyes.

Si aujourd’hui, nous parlons de 40 ans, c’est parce que le 21 août 1979 représente la date où les Sœurs quittèrent leur maison provisoire de Bacongo, qui n’est autre que le Foyer Abraham pour rejoindre le nouveau monastère de Kinsoundi. Nous lisons : « Le 24 août 1979, nous quittions notre maison de Bacongo le matin de très bonne heure, à pieds, portant en secret Jésus Eucharistie sur notre cœur : route de prière jusqu’au monastère, à Kinsoundi. La première messe eut lieu le même jour, célébrée par notre Archevêque entouré de quelques prêtres amis, dans une pièce de l’accueil aménagée en oratoire. Après la messe, Mgr Batantu posa la première pierre de la chapelle. »

Ce 24 août 1979 ne fut pas une date quelconque. C’est le jour où l’Église nous invite à célébrer la mémoire liturgique de St Barthélémy qui était aussi la fête patronale de Mgr Batantu. C’est donc un samedi plus que symbolique pour nous de fêter ce jubilé des 40 ans de l’implantation du premier ordre contemplatif, de surcroît un Carmel, dans notre diocèse.

Novembre 1979, on pouvait déjà goûter les prémices de cette fondation : il s’agissait des deux premières postulantes, Sœurs Pauline de Jésus et Françoise de la Passion. Ainsi, à la suite du Cardinal, Mgr Barthélemy BATANTU va suivre avec sollicitude le cheminement de ce Carmel, que tous désiraient voir authentiquement africain et fidèle à son charisme propre dans l’Église. La bénédiction du Monastère aura lieu, le 16 juillet 1980, par Mgr Barthélemy BATANTU, en la fête de Notre-Dame du Mont Carmel.

Après quarante années passées dans les difficultés liées à leur petit nombre, mais aussi et surtout, liées aux différentes situations tragiques socio-politiques vécues dans notre Pays, il est impérieux de souligner que nos sœurs se sont engagées et s’engagent davantage dans la vie de notre Archidiocèse de Brazzaville. Et leur joie d’être ici est immense tout comme pour nous.

Après ce bref aperçu historique, ressourçons-nous maintenant à la Parole de Dieu.

De la liturgie de la Parole d’aujourd’hui, l’Église, en cette fête du martyre de Saint Barthélemy, nous donne de méditer sur la rencontre de Jésus avec Nathanaël de laquelle naîtra sa vocation de disciple. En réalité il sied de signaler que tout part de la rencontre de Jésus et Philippe. À l’issue de cette rencontre Philippe était invité par Jésus à le suivre. Une rencontre vraie avec Jésus ne peut rester stérile, elle rend missionnaire. On aimerait partager l’expérience avec les autres. C’est pourquoi, peu de temps après, Philippe, heureux de cette rencontre, cherche son ami Nathanaël pour lui dire qu’enfin il a trouvé le Messie, celui dont parlaient les prophètes : c’est Jésus de Nazareth, fils de Joseph. A cette annonce toute enthousiaste de Philippe, Nathanaël répond par un scepticisme absolu et intransigeant : « De Nazareth ! Peut-il sortir quelque chose de Bon ? ».

Il faut dire que Nathanaël est un homme de fortes convictions en l’espérance d’Israël basée sur l’attente d’un Messie qui viendrait pour restaurer la royauté en Israël. Connaissant les Écritures, il sait d’où sortirait le Messie (de Bethléem). Il n’y a donc aucun déguisement en lui, aucune forme d’hypocrisie. Alors que tout juif sait que le Messie devait naître à Bethléem, d’où vient qu’on aille chercher un Messie dans ce trou perdu de Nazareth ?

En effet, il a conscience de sa foi ; et donc, n’est pas prêt à croire ni en n’importe quoi, ni en n’importe qui. Et Jésus d’ailleurs reconnaît cela, voilà pourquoi il déclare que : « Voilà un véritable fils d’Israël, il n’y a rien de faux en lui ». Ceci peut être pour nous un exemple de foi : être fier de ses convictions religieuses. A l’heure où la plupart des chrétiens sont devenus sans personnalité religieuse ; surtout devant les maladies, les décès, le chômage. On se laisse séduire par n’importe quoi et par n’importe qui. On papillonne d’une église à une autre ; d’une croyance à une autre. Et aujourd’hui, tous nous sommes témoins des dégâts engendrés par ce manque de personnalité religieuse qui nous habite de plus en plus : des familles sont divisées ; des personnes âgées abandonnées, à cause des « prophéties » ; des cas d’escroqueries signalés çà et là.

Par ailleurs l’auteur Johannique nous révèle que malgré ce refus, Philippe ne se décourage pas. Étant de bons amis, il s’explique davantage et invite Nathanaël à l’accompagner : Viens, et tu verras, lui dit-il. C’est parce que Philippe a fait une expérience personnelle du Christ en demeurant auprès de lui qu’il invite son ami à tenter la même chose. Alors il y va ; et cette première rencontre qu’il aura avec Jésus va déterminer sa vocation. Fort est de constater que cette rencontre entre Jésus et Nathanaël qui semblait être hasardeuse, était en réalité, bien préparée à l’avance dans le plan de Dieu. Car pour Jésus, Nathanaël, n’est pas inconnu. D’ailleurs il lui dira : « avant que Philippe te parle, quand tu étais sous le figuier, je t’ai vu ». De quel figuier parle-t-il ? Probablement l’endroit préféré de Nathanaël où comme maître de la loi, il enseignait ses ouailles. Mais tout cela, il le vivait sous le regard de Dieu.

Cette note nous donne de comprendre que notre rencontre avec Dieu se fait très souvent au cœur de nos engagements spirituels, professionnels, sociaux et familiaux. Nathanaël, c’était sous le figuier ; Moïse, c’était du milieu de son troupeau ; Paul, c’était sur la route de Damas, alors qu’il allait à la réalisation de sa mission de persécuteur ; Pierre, André, Jacques et Jean, c’était dans leur activité de pêcheurs au bord du Lac de Tibériade ; Matthieu, c’était devant son bureau de collecteur d’impôts.

Isaïe vit également la même réalité. Sa vocation de prophète naît de sa « douloureuse » rencontre avec le Seigneur dans une vision. Il voit la gloire de Dieu. Pris de panique, il crie malheur : Malheur à moi, je suis perdu. Et pourtant, pendant qu’il se croit maudit d’avoir fait l’expérience de la rencontre avec Dieu, c’est là que Dieu l’appelle à son service : « Qui enverrai-je ? dit, le Seigneur, qui ira pour nous ? ». À lui de se ressaisir et de répondre avec promptitude : « Me voici, envoie-moi ».

À vous aussi mes chères Sœurs le Seigneur vous a rencontrées chacune là où elle se trouvait. Peut-être comme Nathanaël qui l’a rencontré par l’intermédiaire de Philippe. Vous l’avez rencontré chacune à sa manière. Peu importe il faut simplement noter qu’il vous a choisi chacune suivant son histoire, pour faire de vous ses disciples. Des disciples qui œuvrent dans l’Église et dans le monde, loin de tout, choisissant la vie contemplative, le cloître afin d’annoncer aux hommes et aux femmes, la gloire et l’éclat du Règne de Dieu. Il vous faut, et à votre suite, nous tous, dire sans hésitations : me voici Seigneur, envoie-moi. Ne tergiversons pas dans notre marche à la suite du Christ.

Ne nous laissons jamais alourdir par les doutes les hésitations et les lenteurs suscités parfois par l’hostilité du monde ; par les carences de vocation et les difficultés de santé, etc. Comptons toujours sur notre Dieu se montrant toujours, dans n’importe quelle situation, comme un Père providentiel ; qui d’un rien est capable de faire grand. Il faut croire, permettez-moi l’expression, au bricolage sans défaut de Dieu. D’ailleurs dans son exposé, intitulé Prière au Dieu bricoleur de génie, Père Stan ROUGIER écrivait que « Dieu est un vrai bricoleur de génie. En effet, avec un couple stérile, Abraham et Sarah, il engendre un peuple. Avec un bègue, Moïse, il fait un prophète. Avec un petit berger, David, il anéantit les tyrans. Avec des lâches de Galilée, il invente les apôtres. D’un renégat, Pierre, il fait le premier Pape. D’un chef de commando antichrétien, Saul, il fait un Paul, amoureux du Christ. D’un blouson doré, bourré d’argent et de vanité, il nous fait un François d’Assise ».

Faites-lui confiance ! Des bricoles dans vos vies de moniales, il en fera toujours. Des bricoles dans nos vies de chrétiens : de pasteurs ; de prêtres ; de religieuses et religieuses ; de travailleurs, de chômeurs ; de responsables ; il en fera toujours pour le salut.

Que les Saints du Ciel qui ont fait l’expérience du Dieu bricoleur de génie intercèdent pour nous et pour notre monde. Amen !

 

Monseigneur Anatole MILANDOU
Archevêque de Brazzaville

 


 

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