LA FAMILLE ET LE MARIAGE CHRETIEN
Publier le 11 février 1986
I. UNE FAMILLE NOUVELLE POUR LES TEMPS NOUVEAUX
- Introduction
- 1. L’institution du mariage dans notre coutume
- 2. Le mariage, expression d’une volonté de Dieu
- 3. Nos coutumes se dégradent
- 4. Le Christ appelle nos foyers sur de nouveaux chemins
- 5. Rendre visible l’amour dont Dieu nous aime
- 6. Langage de l’amour pratique de la communion entre l’homme et la femme
- 7. Langage de la liberté et pratique de la responsabilité
- 8. Langage de la sainteté et pratique de la conversion
- 9. Les exigences du salut
- 10. Que nos alliances coutumières deviennent sacrement
- II AUX FIANCÉS
- 11. Il y a des étapes vers la conclusion d’une alliance
- 12. L’Église n’admet pas l’union provisoire
- 13. Prudence chrétienne dans le choix d’un conjoint
- 14. Respectez vos familles elles peuvent vous aider
- 15. La préparation spirituelle des fiancés
- 16. Restaurer les fiançailles chrétiennes
- 17. 17. Accompagner les couples en recherche
- III. FOYERS CHRÉTIENS
- 18. Vous présentez l’avenir
- 19. Vos responsabilités de couple, face à vos familles
- 20. Réglez en foyer votre communauté de biens
- 21. Que chacun ouvre son cœur à la famille de son conjoint
- 22. Assumez en foyer la responsabilité de vos enfants
- 23. Pour une paternité responsable
- 24. Ne séparons pas l’enfant de sa mère
- 25. Un foyer est une communauté de vie à construire
- 26. Faire face aux problèmes de l’habitat en ville
- 27. Responsables de la première éducation de vos enfants
- 28. Que les parents chrétiens participent à la catéchèse
- 29. Communautés des foyers chrétiens dans l’Église
- 30. Vos responsabilités de foyer dans la société
- 31. Les parents et l’école
- 32. Les parents et la collectivité locale
- 33. Couples chrétiens, soyez ce que vous êtes, vivez en couple
- 34. Un combat livré pour le salut des jeunes
- IV. AUX FAMILLES CLANIQUES
- 35. Nos familles dépositaires de notre culture
- 36. Fonctions sociales de la famille
- 37. Nos familles claniques et le renouveau des campagnes
- 38. Nos familles et l’unité nationale
- 39. La famille clanique peut jouer un rôle dans la conclusion des alliances conjugales (don de conseil)
- 40. Signification de la dot
- 41. Que les sœurs ne troublent pas les foyers de leurs frères
- 42. L’enseignement de Monseigneur Théophile Mbemba à propos de l’héritage
- 43. Le mari est le chef de son épouse et de ses enfants
- 44. L’égoïsme de clan
- 45. Remettre à jour sur des bases nouvelles notre système de solidarité familiale
- 46. La pratique familiale des sacrements
- V. AUX JEUNES GENS ET JEUNES FILLES
- VI. AUX OUVRIERS APOSTOLIQUES
- Conclusion
Introduction
Frères et Sœurs,
A la fin de cette année diocésaine de la Famille, après avoir pris connaissance de tous les rapports transmis par les paroisses à la Commission Diocésaine de la Famille, nous avons, en étroite collaboration avec celle-ci rédigé cette lettre pastorale.
Je vous l’adresse comme un fruit du travail commun, auquel ont participé les chrétiens de tous les âges, de tous les milieux et de toutes les traditions coutumières de notre Diocèse.
Au centre de notre réflexion présente, vous trouverez, frères et sœurs, le mariage chrétien. Il est notre espérance pour l’avenir de nos familles et de notre nation. Il est comme un appel que Jésus-Christ adresse à chacun de nous et à chacune de nos communautés.
Il est un don de Dieu à chaque communauté humaine particulière pour le renouveau de la culture de la famille et de la Société.
Fondées sur l’amour des époux chrétiens, enrichies par lui, les familles chrétiennes sont en effet appelées à devenir pour toutes les générations à naître le lieu privilégié de l’initiation au respect, à la justice, à la générosité, à l’amour et à la paix, qui sont les valeurs essentielles de toute civilisation humaine digne de ce nom.
1. L’institution du mariage dans notre coutume.
C’est vers nos propres coutumes, nos traditions, notre culture, frères et sœurs, que tout d’abord je vous invite à tourner vos regards. Qu’avons-nous fait, que faisons-nous de cet héritage que nous ont laissé nos pères ? Nous voudrions à juste titre les voir reconnus et respectés par le monde entier alors que trop souvent nous ne les respectons pas nous-mêmes !
Le foyer conjugal a toujours été dans notre passé la pièce maîtresse de nos coutumes familiales. Nos ancêtres parlaient de la maison, qu’un homme doit construire.
C’était l’honneur d’un homme que de bâtir le moment venu une maison et de la gouverner avec vigueur, sagesse et générosité, pour le bien de son épouse et de ses enfants.
C’était l’honneur d’une femme que de faire preuve dans le foyer de toutes les qualités de mère et d’épouse et de s’attirer par une conduite sans défaillance, les louanges de toute la communauté.
C’était l’honneur des enfants, garçons et filles, leur meilleure recommandation devant la société et leur meilleur gage d’avenir que d’avoir été élevés dans une maison bien gouvernée entre un père et une mère, respectueux de la coutume, fidèles et compétents dans l’exercice de leurs tâches journalières, irréprochables dans leur conduite et sages dans leurs décisions.
C’est que l’union de l’homme et de la femme, étant la source de la vie, leur harmonieuse collaboration étant l’indispensable condition du bonheur et leur cohabitation pacifique un élément fondamental de la paix sociale, l’institution du mariage occupe depuis toujours au sein de chaque culture humaine une place remarquable, objet de la vigilance des anciens et des réflexions des sages.
2. Le mariage, expression d’une volonté de Dieu
Ainsi en était-il dans nos propres coutumes où tout était mis en œuvre pour assurer l’harmonie, la stabilité et la paix des foyers conjugaux. II suffit de rappeler ce qu’ont été dans le passé, l’initiation des garçons et des filles, à leurs tâches paternelles et maternelles, avec les droits et devoirs qui en découlaient, la rigoureuse discipline sexuelle, au respect de laquelle chacun se soumettait pour son honneur et celui de sa famille, le soin apporté au choix d’un conjoint et aux démarches nécessaires à la conclusion d’une alliance familiale, la stricte répartition des tâches au sein du foyer prévue par la coutume, la diligence des familles à intervenir en cas de dissension, de maladie, de deuil ou tout autre accident susceptible d’affecter gravement la vie d’un foyer.
Certes, nos coutumes n’étaient pas parfaites, elles ont donné lieu à des abus, favorisé une domination de l’homme sur la femme, porté atteinte au nom des intérêts du groupe à la liberté des personnes, imposé aux jeunes filles des alliances contraires à leurs vœux, favorisé au détriment des jeunes et des gens les plus simples la position des anciens, détenteurs du pouvoir familial et tribal.
Notre intention n’est pas de prêcher un impossible retour au passé.
3. Nos coutumes se dégradent
Mais nous sommes obligés de constater que, dans une très large mesure, au lieu de s’améliorer, nos pratiques coutumières ont tendance à dégénérer et que, dans de très nombreux cas, bien loin de favoriser la création des foyers stables, elles contribuent à retarder la célébration des mariages, pèsent lourdement sur la vie des foyers allant même jusqu’à provoquer des séparations.
Il en résulte que nos traditions familiales telles que nous les avons laissées se dégrader présentent aux yeux des nouvelles générations, un aspect décourageant et repoussant, qui les amènent à s’en détacher au point qu’un grand nombre de couples vivent aujourd’hui dans notre pays sans avoir contracté la moindre alliance ni devant leurs familles, ni devant l’État, ni devant l’Église.
Tandis que se généralise la pratique de l’union libre et le plus souvent provisoire, l’institution du mariage elle-même est menacée et cela au détriment de nos familles et surtout de nos enfants.
Ceux-ci, déshérités du meilleur de nos traditions et de nos coutumes, sont aujourd’hui abandonnés à d’illusions libertés, qui loin de les préparer à prendre leurs responsabilités dans la famille de demain, implantent en eux, le caprice, le vice et l’instabilité tout en compromettant leurs santés, surtout celles des jeunes filles qui imposent à leurs corps, dès le plus jeune âge, des pratiques contraceptives et abortives ruineuses pour leur équilibre physique et spirituels.
4. Le Christ appelle nos foyers sur de nouveaux chemins
Nous chrétiens, qu’avons-nous fait, que pouvions-nous faire, que pourrons-nous faire dans l’avenir ?
N’avons-nous pas reçu avec l’Évangile de Jésus-Christ le don infiniment précieux du mariage chrétien ?
N’avons-nous pas été appelés à donner à la vie de nos foyers, une qualité et une solidité toute nouvelle pour le plus grand bien de nos enfants et la bénédiction de nos familles ?
Frères et sœurs, le temps est venu pour nous de regarder à nouveau et avec une intelligence toute nouvelle le sacrement du mariage tel que nous le recevons de Jésus-Christ.
Le sacrement du mariage, n’est pas une coutume étrangère venue d’Europe. Il est un don de Jésus-Christ, adressé à chaque peuple et à chaque coutume. C’est un appel à renouveler nos pratiques familiales grâce à l’amour véritable qui est un don de Dieu, le don parfait.
Cet appel nous voudrions que notre Église l’entende à nouveau aujourd’hui comme si c’était pour la première fois, avec des cœurs nouveaux, comme une bonne nouvelle pour des temps nouveaux.
aux couples en recherche,
aux foyers chrétiens,
à nos familles,
aux jeunes enfin.
Frères, n’endurcissons pas nos cœurs et croyons à la Bonne Nouvelle.
L’appel du Christ à vivre une vie nouvelle, libérée du péché et de la mort, a été et est aujourd’hui adressé à tous les peuples de la terre. Nous l’avons entendu à notre tour, il y a cent ans déjà, par la voix des missionnaires envoyés de Dieu.
Ce n’est pas un appel à détruire notre culture, mais bien au contraire, à l’aube des temps nouveaux qui bouleversent à travers le monde les cultures et toutes les coutumes, un appel à choisir notre chemin à la lumière du Christ en discernant ce qui est bon, comme le sage du royaume de Dieu qui sait tirer de son trésor des choses anciennes et des choses nouvelles.
Le cas de nos coutumes familiales est à cet égard tout à fait significatif. Le Christ ne nous demande pas de rompre nos alliances mais de les renforcer en les enrichissant d’une signification nouvelle et d’une grâce nouvelle.
5. Rendre visible l’amour dont Dieu nous aime
Nos alliances conjugales étaient conclues selon la coutume et la sagesse des anciens au mieux des intérêts des époux et de leurs familles respectives.
Jésus nous invite désormais à les conclure sous le regard de Dieu et en son nom, afin que l’union de l’homme et de la femme, rende visible aux yeux des hommes de notre nation l’amour de Dieu invisible. Cet amour de Dieu qui nous a été manifesté en Jésus-Christ venu dans la chair pour nous montrer que Dieu est l’amour et que son amour pour nous est sans limite, les époux chrétiens sont aujourd’hui appelés à le faire apparaître aux yeux des hommes.
“Maris, aimez vos femmes, comme le Christ a aimé l’Église et s’et livré pour elle” (Eph. 5, 25).
Voilà ce que nous voulons dire quand nous affirmons que le mariage des chrétiens est un sacrement. Lien d’amour unique et indissoluble entre un homme et une femme qui se donnent l’un à l’autre, il réalise et signifie l’amour dont Dieu nous aime, l’amour dont le Christ aime son Église.
Chaque couple chrétien, vivant et persévérant dans l’amour est pour ceux qui l’entourent une nouvelle raison de croire en Dieu qui est amour et en l’Évangile.
Chaque couple brisé, chaque foyer détruit est pour ceux qui en sont témoins une nouvelle raison de ne plus croire ni en l’amour ni en Dieu et de désespérer de L’homme.
6. Langage de l’amour pratique de la communion entre l’homme et la femme
Frères et sœurs,
Ce langage est nouveau, c’est le langage du Christ. Nous qui appartenons à son Église, avons-nous fait l’effort de comprendre le langage de Jésus-Christ, pour l’accueillir au plus profond de nos cœurs de telle sorte qu’il devienne notre langage, notre coutume, notre culture ?
Ce langage est celui de l’amour. Il invite les époux à rechercher, avec patience et générosité tout au long de leur vie, une véritable communion :
- Communion de leurs cœurs, attentifs à partager les joies et les peines, les combats, les échecs et les victoires, les souffrances et les deuils de cette vie.
- Communion de leurs corps, dans l’acte de s’unir à la fois pour se témoigner leur amour réciproque et pour enfanter dans l’amour et la bénédiction les enfants que Dieu appelle dans l’existence à travers eux.
- Communion dans leurs projets de vie, leurs ambitions professionnelles, leurs aspirations à améliorer leurs conditions d’existence et celles de leurs enfants. A quoi bon se marier et comment rester un couple si chacun poursuit son propre compte et sans se préoccuper ni de son conjoint ni de ses enfants, sa carrière et ses projets, prêt à saisir la chance quand elle passe, même au risque d’avoir à abandonner pour des mois ou des années le foyer conjugal ?
- Communion de leurs esprits, soucieux de maintenir entre eux un dialogue constant et de réfléchir ensemble afin d’évoluer ensemble, dans ce monde en pleine transformation, où il leur faut gouverner ensemble leur foyer et le conduire ensemble à travers les difficultés et les dangers de la vie.
- Communion de leurs volontés, unies dans la décision persévérante de bâtir ensemble avec leurs enfants et pour eux une communauté familiale vivante, éducatrice et nourricière, riche non seulement du pain et du confort quotidien mais aussi de tradition, de sagesse et de dons spirituels.
- Communion dans leur désir de progresser ensemble sur le chemin de l’Évangile, en mettant en œuvre tous les moyens spirituels que leur offre l’Église, pour renouveler en eux tout au long de leur vie la grâce de leur baptême, la foi, l’espérance et l’amour.
Oui, frères et sœurs, il nous faut découvrir ce langage chrétien de l’amour et cette pratique de la communion entre l’homme et la femme si nous voulons que nos couples deviennent en toute vérité les sacrements de l’amour de Dieu de telle sorte qu’en voyant vivre les foyers chrétiens, chacun puisse s’exclamer : Voyez comme ils s’aiment ! Et rendre gloire à Dieu qui inspire un tel amour au cœur des hommes.
7. Langage de la liberté et pratique de la responsabilité
Mais ce langage nouveau de Jésus-Christ, qu’il nous faut aussi apprendre à exprimer dans nos langages et dans notre coutume est aussi celui de la liberté. En effet, un tel amour, une telle communion entre un homme et une femme, n’est possible que si chacun d’eux est capable de faire en toute liberté et dans la joie de son cœur le don de lui-même à son conjoint.
Le langage de la liberté est celui de l’égalité.
En effet, ce don réciproque, généreux, définitif et total n’est possible entre personnes humaines, que si elles se reconnaissent égales en dignité, chacune méritant que l’autre lui offre toute sa vie, tout son amour, toute sa capacité de bonheur et le meilleur de lui-même.
Dès lors que l’homme se reconnaîtrait des droits qu’il refuse à sa femme, et que celle-ci se trouverait victime d’une pratique familiale qui la réduirait à l’état d’une servante ou d’une concubine, l’amour ne serait plus possible. Il est certain que, dans notre pays les hommes ont un grand effort à faire pour apprendre le langage chrétien de l’égalité entre l’homme et la femme.
De même, les femmes, dans leurs aspirations légitimes à être reconnues dans leur dignité, leurs capacités et leurs droits, ne doivent pas, sous prétexte d’émancipation, fuir leurs responsabilités et perdre à leur tour le sens du respect qui est le fondement de toute relation humaine.
Le langage chrétien de la liberté c’est aussi celui de la responsabilité et de l’engagement personnel.
La décision qui crée un couple chrétien n’est pas d’abord et principalement celle de leurs familles respectives. Elle est celle de l’homme et de la femme, qui après s’être librement choisis, assument ensemble, devant Dieu, leurs responsabilités d’époux, responsables l’un de l’autre et responsable ensemble de la vie et de l’éducation de leurs enfants.
C’est pourquoi il est écrit qu’en fondant un couple “l’homme quitte son père et sa mère et s’attache à sa femme et qu’ils ne sont plus deux mais une seule chair” (Mt 19, 55).
Nous avons besoin aussi d’apprendre ce langage chrétien de la liberté, qui fait de chaque couple nouveau une personne nouvelle, avec des devoirs nouveaux et des droits nouveaux, que chaque famille doit apprendre à respecter.
8. Langage de la sainteté et pratique de la conversion
Le langage de Jésus-Christ, le langage de l’amour chrétien est aussi celui de la sainteté.
Il faut un cœur pour aimer, et il faut que ce cœur se soit engagé avec courage et résolution sur le chemin de la conversion et de la lutte quotidienne contre le péché.
L’amour chrétien ne peut ni naître ni grandir dans un cœur malade de jalousie, de rancune, d’égoïsme, d’orgueil et occupé à la satisfaction de toutes sortes de convoitises.
Voilà pourquoi l’engagement des époux chrétiens est aussi un engagement à progresser ensemble, sur le chemin de la sainteté. Et, si l’un des conjoints s’arrête, renonce ou recule sur ce chemin montant de l’Évangile, il impose à l’autre une rude déception et une épreuve spirituelle bien lourde à supporter.
9. Les exigences du salut
Frères et sœurs,
L’appel de Jésus à faire de nos alliances conjugales un sacrement de l’amour de Dieu exige des époux une ouverture de l’intelligence et du cœur au langage chrétien de l’amour et de la liberté.
Il exige d’eux, qu’ils s’engagent dans une lutte personnelle et courageuse contre le péché.
Il exige d’eux qu’ils renoncent à certaines dispositions de notre coutume, telles que la polygamie, qui ne permet pas cette communion d’amour entre l’homme et la femme et qu’ils maîtrisent comme nous allons le dire plus loin des comportements familiaux qui risquent de porter gravement atteinte à l’intimité, à l’intégrité, à la liberté et à la responsabilité des foyers.
Mais en revanche, ne voyons-nous pas à quel point le mariage chrétien, tel qu’il nous est donné dans l’Évangile de Jésus-Christ, constitue un don d’une extraordinaire richesse fait à nos familles traditionnelles, à la veille des grands bouleversements de la vie moderne ?
Avons-nous rien de plus solide, à quoi rattacher le vaisseau en perdition de la famille traditionnelle, que des foyers chrétiens, bâtis sur le roc de la Parole de Dieu, vivant de la foi, de l’espérance et de l’amour ? Eux-seuls peuvent assurer dans le nouvel esprit, qui convient à des temps nouveaux, la cohésion des familles, la libération de la femme, la prise en charge des enfants et, comme nous le souhaitons, une solidarité nouvelle, intelligente et si possible renforcée au sein de nos familles.
Vraiment, frères et sœurs, les négligences des chrétiens et leurs refus de s’engager sur le chemin du mariage chrétien sont d’une extrême gravité.
Nous devons comprendre “que Jésus est la vigne, que nous sommes les sarments”, et que la branche détachée de l’arbre ne peut porter du fruit (Jn 15, 4-5).
Toutes ces années vécues dans l’hésitation et le doute, loin de la communion de l’Église, sont pour nos foyers des années de grâce perdues.
Avons-nous bien compris tout ce que la vie sacramentelle de l’Église possède de richesses spirituelles et tout ce que nous perdons de vitalité en vivant nos vies loin des sacrements ?
Le sacrement de mariage est destiné à associer étroitement les époux chrétiens à l’œuvre du salut du monde en Jésus-Christ. Chacun devient pour l’autre dans un couple une source abondante de grâces et de bénédictions, les deux époux deviennent ensemble une source de force, de lumière et d’amour pour leurs enfants.
Même la souffrance du foyer, vécue en étroite union avec le Christ Sauveur du monde, devient, grâce au sacrement du mariage, une source de salut pour le monde entier.
La vie charnelle du couple, sa vie quotidienne, chacun de ses soucis, même le plus matériel, devient, grâce au sacrement, un acte d’amour qui illumine nos vies et sauve le monde.
Grâce au sacrement tout ce qui n’était que charnel, soumis à la convoitise et voué à la mort devient par la grâce de Jésus-Christ une réalité toute nouvelle, libérée du péché, transformée par l’amour et gage de vie éternelle.
Frères et sœurs, ne négligeons pas plus longtemps, toutes ces sources de la vie, ces sources de la paix et de la réconciliation, ces sources de salut dont nos familles et notre nation ont tant besoin.
10. Que nos alliances coutumières deviennent sacrement
Comme nous voudrions que se réalise au sein de notre Église, pour le salut de nos familles et celui de nos enfants, la rencontre harmonieuse entre notre héritage coutumier et le don que nous avons reçu du Christ, qui loin de détruire nos alliances familiales les élève à la dignité d’un sacrement.
Pour cela, il faudrait déjà que les chrétiens prennent l’habitude d’associer en même temps leurs familles et la communauté chrétienne à laquelle ils appartiennent à leur projet d’union.
En effet, un projet de mariage doit être, pour le chrétien, en même temps un projet familial et un projet religieux, un projet chrétien.
Nos communautés chrétiennes, sont-elles prêtes à assumer le rôle qui est le leur dans cette grande affaire ? Sommes-nous en mesure d’accueillir les projets matrimoniaux des jeunes chrétiens, d’éclaircir leur choix, d’accompagner leur préparation spirituelle et de leur donner des moyens, lorsqu’ils décident de s’engager, de le faire au nom du Christ et selon son esprit ?
S’il en était ainsi, nous n’aurions plus à parler parmi nous de deux mariages, celui de la coutume et celui de Dieu. Il nous suffirait de célébrer dans l’esprit du Christ répandu dans nos cœurs, la présence réelle de Dieu au cœur de nos alliances, devenues, selon sa volonté et grâce à la conversion de nos cœurs, les très authentiques sacrements de son amour.
II. AUX FIANCÉS
Mais pour parvenir à cette heureuse évolution de notre coutume ainsi renouvelée par notre foi en Jésus-Christ et par notre pratique de l’Évangile, qui devrait nous permettre de célébrer nos alliances familiales d’un seul et même mouvement de nos cœurs devenus chrétiens, il faut que nous accomplissions, les uns et les autres au sein de nos familles une profonde conversion de nos comportements et de nos mentalités.
11. Il y a des étapes vers la conclusion d’une alliance
C’est à vous jeunes gens et jeunes filles devenus par le Baptême, une humanité nouvelle à l’image de Jésus-Christ que nous adressons en premier lieu l’appel du Seigneur à vous renouveler selon son Évangile.
Vous qui êtes parvenus à l’âge où l’on fonde un foyer, ouvrez vos cœurs à ce que l’Église vous propose au nom de Jésus et avec l’assistance de son esprit, pour votre bonheur et la pleine réussite du foyer que vous rêvez de fonder.
L’Église reconnaît la nécessité qu’avaient déjà discernée nos ancêtres de procéder avec prudence et par étape à la conclusion d’une alliance conjugale.
Elle reconnaît aussi l’utilité d’associer autant que possible et compte tenu de l’évolution actuelle des pratiques familiales, les familles respectives des futurs conjoints à la conclusion d’une telle alliance.
12. L’Église n’admet pas l’union provisoire
Mais l’Église ne reconnaît pas aux individus le droit d’improviser le mariage à l’essai ni des unions provisoires.
Cette pratique, bien qu’elle tende à se généraliser ne saurait convenir à des chrétiens.
Elle n’est pas conforme à la dignité de la personne humaine et au respect profond que les époux se doivent l’un à l’autre. La vie maritale engage trop profondément les personnes, surtout qu’elles ont été initiées à la vie spirituelle et elle est de nature à marquer trop irrémédiablement l’existence d’un être humain pour qu’il soit permis de la pratiquer à titre de simple essai sans intention ferme de s’y engager véritablement.
Contrairement à ce que l’on dit souvent, cette pratique n’est pas non plus nécessaire, ni même favorable au choix prudent d’un conjoint.
Par contre, en se généralisant, elle contribue très fortement à relativiser l’engagement conjugal et à promouvoir l’instabilité des foyers.
Quant aux enfants nés de ces unions expérimentales et provisoires et qui n’auront pas la chance de grandir au milieu des parents qui les ont mis au monde, ils sont les victimes innocentes de ces coupables improvisations.
13. Prudence chrétienne dans le choix d’un conjoint
Nous voulons rappeler ici, avec force, que le choix d’un conjoint ne s’improvise pas. La simple attirance mutuelle éprouvée au hasard d’une rencontre ne peut suffire à le déterminer.
Se risquer à une seule initiative, à la suite d’une simple aventure, dans une expérience de cohabitation maritale, n’est pas une façon normale, pour un chrétien, de s’engager dans les liens du mariage. Et il ne faut pas s’étonner si cette manière de procéder conduit dans la plupart des cas à des échecs conjugaux répétés qui amènent aujourd’hui dans notre pays, un nombre croissant d’hommes et de femmes à renoncer purement et simplement au projet d’une vie conjugale stable.
Le fait est que désormais, dans l’immense majorité des cas, les futurs conjoints se choisissent sans en référer à leurs parents et ne se présentent à leurs familles respectives qu’après décision prise.
Il reste qu’un certain nombre de jeunes préfèrent encore s’en remettre à leurs familles du soin de leur présenter un conjoint, selon les procédures de la coutume ancienne.
Aux uns et aux autres, nous voulons rappeler quelques règles élémentaires de sagesse et de prudence chrétienne.
14. Respectez vos familles elles peuvent vous aider
Certes l’alliance conjugale, nous ne le répéterons jamais assez, consiste essentiellement dans la décision de deux conjoints d’unir leur vie, de fonder un foyer et d’y prendre ensemble l’entière responsabilité de leurs enfants.
Mais il demeure que, sauf anomalie, chacun des deux conjoints est issu de deux familles auxquelles le relient les liens du respect, de la reconnaissance et de la solidarité.
Selon nos coutumes, il résulte de la création d’un nouveau foyer une alliance entre les quatre familles dont il est issu. Cette alliance est si réelle et si forte qu’elle est appelée à subsister même après que la mort où la dissension auraient rompu le lien conjugal.
Ce réseau vivant et chaleureux des liens familiaux tissés autour de lui, constitue normalement pour le nouveau foyer et pour les enfants qu’il met au monde une société naturelle, un terreau de traditions et de valeurs morales et culturelles qui ont une grande signification humaine et spirituelle et enfin une assise sociale, un lieu de reconnaissance et de fête pour les temps de bonheur, un lieu de refuge et d’assistance pour le temps de malheur. Vouloir conclure une alliance conjugale sans tenir compte de ces réalités familiales est, sauf exception, une preuve d’immaturité, de manque de culture et de sagesse, fruits amers d’une mauvaise éducation.
Aussi, quelle que soit la manière dont ils se sont connus et choisis, nous ne saurions trop conseiller aux fiancés de s’informer avec un grand soin de coutumes que trop souvent les jeunes ignorent et de faire, comme il se doit, avec respect et bonne volonté la connaissance de la famille proche et si possible lointaine de leur futur conjoint.
Pour cela, ils feront bien de se laisser guider par les membres de leur famille les plus aptes à les conseiller et à les instruire.
Cette découverte attentive par les fiancés de la famille de leur futur conjoint est infiniment plus profitable et plus nécessaire au choix définitif qu’ils ont à faire l’un de l’autre, que n’importe quelle expérience improvisée de vie commune.
Les démarches traditionnelles de respect aux membres de familles en vue notamment du règlement de la dot, à condition que l’on se conforme en ces matières à des pratiques saines et raisonnables dont nous parlerons plus loin, ont pour but de nouer entre les familles des liens de connaissance, d’estime et de sympathie et de permettre aux fiancés, en explorant le milieu familial de leur futur conjoint de mieux savoir avec qui ils s’engagent dans l’existence et à quels nouveaux liens de famille l’amour de leur conjoint les rend désormais participants.
Dans bien des cas, ces contacts familiaux seront très opportunément, pour les fiancés, le moyen de vérifier la validité de leur choix. Le regard affectueux et expérimenté d’une maman, d’un papa, d’une sœur, d’un frère ou d’un membre de famille particulièrement proche, peut dans bien des cas dessiller les yeux d’un jeune, aveuglé par trop de sentiment et lui éviter de s’engager dans une union impossible, vouée à l’échec.
15. La préparation spirituelle des fiancés
Mais s’agissant des jeunes chrétiens, il est tout à fait évident, qu’ils disposent normalement, grâce à leur formation chrétienne et à leur vie en Église de précieux moyens pour effectuer le choix de conjoint.
Il serait tout à fait déraisonnable de s’engager avec un partenaire sans rien comprendre de sa vie spirituelle. En effet, 1’amour conjugal est essentiellement une expérience spirituelle.
Les fiancés chrétiens doivent donc se donner le temps de parler en profondeur de leurs convictions les plus fondamentales.
Comment lier sa vie à celle d’un autre dont on ne sait ni en qui ni en quoi il croit, ni à quelle loi il obéit, ni ce qu’il pense des enfants, de l’éducation, de la vie de famille, de la souffrance, de la mort, de la magie, de l’argent, de la justice, de l’amour, de la prière, de l’Évangile ? A quoi bon lier sa vie à celle d’un autre qui se reconnaît le droit de trahir son conjoint et de l’abandonner et d’attenter à l’honneur des siens, selon ses caprices, ses intérêts et ses ambitions ?
Là encore nous affirmons, qu’une pratique commune de la prière, des sacrements, de l’ascèse chrétienne et du partage au sein de la communauté chrétienne est beaucoup plus nécessaire à la connaissance mutuelle et au choix définitif des fiancés que des expériences improvisées de cohabitation, irrémédiablement faussées par des problèmes de relations sexuelles, de fécondité et de subsistance économique, affrontés prématurément et sur des bases faussées d’avance.
16. Restaurer les fiançailles chrétiennes
Nous appuyant tout à la fois sur la sagesse des anciens et plus encore sur celle de l’Évangile et de l’Église en dépit de la mode actuelle qui ne saurait en aucune façon constituer une norme pour un chrétien, devenu par son Baptême lumière dans les ténèbres de ce monde, nous réaffirmons très fortement, sans aucune crainte de nous tromper et pour le bien de tous, qu’il existe un temps de fiançailles, qui n’est pas un temps de relations sexuelles ni de cohabitation conjugale.
Ce temps de fiançailles est, pour les fiancés, un temps de discernement, de sanctification, de maturation, de préparation spirituelle et d’initiation à la vie, à ses épreuves et à ses responsabilités.
Notre Église, nos familles chrétiennes et nos communautés chrétiennes sont devenues sur ce plan, gravement déficientes et nous proposerons plus loin les moyens de l’indispensable renaissance de fiançailles chrétienne, pour la préparation au mariage chrétien des générations nouvelles.
Mais en toute hypothèse, nous serions gravement coupables envers nos jeunes si nous les laissions ignorer sur quel chemin de perfection, de sagesse et de générosité ils s’engagent. Le Seigneur les appelle aujourd’hui, pour être dans ce pays les artisans du renouveau de la famille et les témoins d’un amour et d’une liberté véritable.
C’est en effet sur ce chemin montant que, répondant aux exigences de l’amour et de la vraie liberté, ils connaîtront, avec la grâce de Dieu, le bonheur véritable selon qu’il est écrit : “Bienheureux les cœurs purs, ils verront Dieu” (Mt 5, 8).
17. Accompagner les couples en recherche
Nous voulons que ces vérités soient réaffirmées parmi nous, d’une manière absolument claire et sans aucune ambiguïté car elles nous ont été données pour éclairer notre chemin, comme il est écrit Celui qui aime la lumière vient vers la lumière.
Mais nous n’oublions pas pour autant, les très grandes difficultés sociales, qui font aujourd’hui obstacle à la conclusion de véritables alliances familiales et à la construction de foyers stables.
Parmi celles-ci, nous voulons citer les conditions de la scolarité, qui prolonge bien au delà de la puberté l’immaturité sociale des individus, la nouvelle mobilité sociale déracine les personnes plusieurs fois de leur vie et les rend profondément incertaines de leur avenir et par conséquent moins aptes à s’engager, sans arrières pensées, dans une alliance conjugale définitive.
Il faut aussi considérer la déstabilisation et l’éclatement des familles qui prive notre jeunesse d’un modèle conjugal intelligible, capable d’orienter leurs aspirations et leurs projets d’avenir, l’immoralité ambiante enfin, cause de déceptions si nombreuses que les hommes et les femmes de meilleure volonté ne s’engagent pas dans les liens du mariage, sans envisager d’avoir bon gré mal gré à faire un jour l’expérience d’un divorce ou d’une séparation.
Pour toutes ces raisons et d’autres encore qui appellent de la part de notre Église des études approfondies, selon tous les moyens que nous donne l’utilisation des sciences humaines, jointe à la pratique du discernement spirituel, nous savons que de nombreux chrétiens, vivent aujourd’hui en ménage, sans avoir conclu d’alliance ni devant leur famille ni devant l’Église ni devant l’État.
Nous ne voulons en aucune façon, qu’à la lecture de cette lettre, ces foyers dont beaucoup ont déjà donné le jour à des enfants et participent activement à la vie de l’Église se sentent ni jugés ni encore moins condamnés par nous. Quel que soit l’itinéraire qui les a conduits à cette vie commune, notre plus cher désir est de voir leur foyer se consolider, leur amour grandir, se fortifier et rayonner et leurs enfants bénéficier de la paix et de la prospérité de leur foyer.
Du fond de notre cœur, nous ne leur souhaitons que de la lumière et du bonheur.
Mais nous leur disons :
“Frères et sœurs entendez aujourd’hui l’appel du Seigneur Faites revivre en vous la grâce de votre Baptême. Au lieu de vous comporter comme des pécheurs publics et des excommuniés, redevenez en quelque sorte des catéchumènes, mettez-vous en chemin, pour réinsérer dans le grand corps vivant de l’Église votre vie de couple et de famille et l’apporter comme une nouvelle source de grâces et de bénédictions dans la communion de l’Église.
N’attendez pas des hasards de la vie qu’ils vous ouvrent les chemins du sacrement de mariage, soyez bien Convaincus que seule votre décision compte et si vous la prenez aujourd’hui même dans la lumière de Jésus-Christ et avec sa grâce, rien ne pourra jamais faire sérieusement obstacle, ni à la conclusion de votre alliance, ni à la fidélité de votre amour.
Nous invitons de la manière la plus pressante chaque communauté de notre Diocèse à se donner après mure réflexion les moyens d’une pastorale des couples en recherche, afin de les aider avec patience et réalisme et dans la charité du Christ Jésus à retrouver le chemin d’une pleine et joyeuse communion avec l’Église”.
III. FOYERS CHRÉTIENS
C’est maintenant aux foyers chrétiens que nous nous adressons, à vous qui avez conclu votre alliance dans l’Église en présence de Dieu, au nom du Père, du Fils et de l’Esprit Saint.
Frères et sœurs, réveillez en vous la grâce de votre sacrement. Renouvelez en vous la conscience de l’appel que le Seigneur lui-même vous a adressé par la voix de votre conjoint, le jour où vous vous êtes engagés dans les liens sacrés du mariage. Vous avez été appelés sur un chemin, afin que vous y marchiez avec courage à travers les joies et les peines de cette vie, sources de grâces et de bénédiction dans la communion de l’Église.
18. Vous présentez l’avenir
Même si vous ne représentez pas le plus grand nombre, vous représentez l’avenir.
Il n’est pas possible en effet, que l’infidélité conjugale, l’irresponsabilité parentale, la délinquance sexuelle et le jeu dérisoire de la nouvelle polygamie, avec ses rivalités de concubines, la surenchère au luxe et la corruption qu’elle entraîne puisse constituer un modèle social pour l’avenir.
L’équilibre social et l’avenir d’une société repose sur les vertus et non sur les vices.
Il ne faut pas confondre les symptômes d’une société qui a la fièvre avec l’apparition de nouvelles normes sociales.
En dépit du grand bruit, de la grande publicité et des grands exemples dont bénéficie la dégradation des mœurs, vous seuls, foyers chrétiens, dans la mesure évidemment où vous vivez effectivement cette vie d’amour à laquelle vous vous êtes engagés, pouvez justifier pleinement le choix que vous avez fait d’une vie conjugale unique, indissoluble et responsable de vos enfants et cela aussi bien devant les exigences de nos coutumes, que devant celles de la raison, de la morale, du respect des personnes, du bien des enfants, de la famille et de la société.
Soyez conscients et fiers de représenter l’avenir de l’amour et celui de la famille au sein de notre culture nationale, comme au sein de la civilisation humaine universelle.
19. Vos responsabilités de couple, face à vos familles
Couples chrétiens face à vos familles respectives vous devez prendre une conscience nouvelle de ce que vous êtes en réalité.
Vous avez, selon la sagesse des anciens, en pleine conformité avec le plan de Dieu et en répondant à l’appel de Jésus bâtir une maison. Elle est la demeure de Dieu et elle vous appartient en propre. Elle est destinée d’abord à accueillir les enfants que vous mettez au monde, avec ceux que vous décidez en outre d’un commun accord de prendre en charge.
Vous êtes ensemble les seuls responsables devant Dieu et devant la société de cette maison que vous avez bâtie. Ne laissez personne l’envahir ni la piller ni la détruire.
Face à vos familles respectives, vous êtes devenus ensemble un foyer, c’est-à-dire une source d’initiatives et de décisions que vous avez à prendre ensemble, dans l’intérêt de vos propres enfants d’abord, pour le plus grand bien de vos familles ensuite.
Frères et sœurs, ne vous divisez pas face à vos familles. Demeurez ce que vous êtes, un foyer, une source. Car vous avez quitté père et mère, pour ne plus être deux mais une seule chair (Mt 19, 5).
Ensemble, vous êtes pour vos enfants une source de vie et d’amour, ensemble, soyez pour vos familles respectives source de paix, de solidarité et de bénédiction.
20. Réglez en foyer votre communauté de biens
Ce qui est en cause ici, c’est en particulier la gestion de vos biens respectifs dans l’intérêt de votre foyer et de vos enfants, en même temps l’exercice d’une salutaire solidarité avec vos familles respectives.
Chaque couple doit, dans ce domaine mettre au point le fonctionnement de cette communauté de biens sans laquelle il ne peut y avoir ni communauté de cœurs, ni paix dans le foyer.
Lorsque nous disons communauté de biens, nous n’entendons pas parler du régime matrimonial désigné par le code civil sous ce non.
L’Église n’a pas de raison d’imposer une préférence à priori pour tel régime matrimonial ou tel autre.
Ce qui importe à la qualité chrétienne de votre foyer, c’est qu’il fonctionne effectivement comme une communauté économique, sur la base d’un dialogue confiant, permanent et sans arrière pensée entre les époux.
Ceci suppose une volonté commune des époux de contribuer chacun selon ses moyens aux dépenses du ménage et à l’entretien des enfants. Ils doivent réfléchir et contribuer ensemble avec sagesse à l’épargne du ménage quand celle-ci est possible et à la constitution d’un patrimoine qui constituera l’héritage de leurs enfants. Ils doivent enfin décider ensemble, d’un commun accord une pratique dynamique et intelligente de la solidarité familiale avec leurs familles respectives.
Les foyers chrétiens auront tout particulièrement à cœur de contribuer à l’entretien de ceux qui les ont mis au monde et qui les ont élevés.
De même, nous devons être scrupuleusement attentifs à ne pas laisser dans nos familles des orphelins sans soutien.
Enfin, en ces temps difficiles, la charité chrétienne doit inspirer aux foyers chrétiens les moyens les plus appropriés pour lutter contre la misère, tout particulièrement en participant activement aux initiatives de l’Église pour le soulagement de ceux qui souffrent et qui sont dans le besoin.
Mais en tout ceci, il convient de rappeler qu’il n’est pas conforme à l’esprit de la communauté conjugale chrétienne, que les époux ignorent les ressources de leur conjoint et l’usage qu’il en fait et que chacun pratique pour son propre compte la solidarité familiale, sans en informer son conjoint.
En agissant ainsi, chacun se mettrait invinciblement sous la coupe de sa propre famille et viderait de tout contenu le projet du couple, comme cellule nouvelle de la société et source nouvelle, de droit, de décision, de vie, d’amour et de bénédiction.
En outre l’ignorance où chacun est des projets de l’autre est source de méfiance et de frustrations qui minent lentement la joie et la paix du foyer.
Cette question est si grave, la mentalité générale si mal préparée à la pratique chrétienne de la communauté des biens et les préjugés si tenaces dès qu’il s’agit d’argent, que nous demandons au Mouvement des Foyers Chrétiens d’organiser dès que possible un Séminaire sur la gestion de l’économie domestique et d’en publier les résultats, de telle sorte qu’un grand nombre de couple puissent envisager de réformer généreusement leur pratique en ce domaine, à la lumière des conseils compétents.
21. Que chacun ouvre son cœur à la famille de son conjoint
Mais le problème de l’existence de votre foyer face à vos familles respectives ne se limite pas aux questions d’argent.
Par le mariage, chacun devient un membre vivant de la famille de son conjoint et il est bon que chacun dispose généreusement son cœur à nouer les liens d’affection avec sa nouvelle famille.
Les époux doivent s’efforcer de réserver ensemble et d’un même cœur le même accueil joyeux aux membres de leurs deux familles, dans les sages limites qu’impose la nécessaire préservation de la paix de leur foyer.
Mais les comportements discriminatoires de chaque conjoint en faveur des membres de sa propre famille, même quand ils sont inconscients, sont contraires à l’esprit de la communion à laquelle sont appelés les époux chrétiens.
A la longue, ils provoquent dans de nombreux foyers des dissensions qui peuvent devenir grave avec le temps.
Que chacun ait donc à cœur d’accueillir avec bonne volonté les justes remarques de son conjoint à ce propos. Selon la parole de l’Apôtre c’est la charité qui édifie. C’est-à-dire qui est constructive.
22. Assumez en foyer la responsabilité de vos enfants
Les principes que nous venons d’affirmer concernant la position de votre couple face à vos familles respectives s’appliquent, frères et sœurs, en tout premier lieu à la responsabilité que vous portez ensemble devant Dieu, des enfants que vous mettez au monde.
Personne, ni au niveau de vos familles ni à celui de l’État, n’a le pouvoir de vous en déposséder tant que vous avez les capacités physiques, mentales et sociales de l’assumer.
Tous les rapports qui nous sont parvenus des paroisses et des communautés chrétiennes font état du débat bien connu de nous tous sur le statut de l’enfant au sein de ses familles paternelle et maternelle.
Il résulte de l’application que nous faisons aujourd’hui de nos coutumes, que parents et enfants n’appartiennent pas à la même famille.
Celles de nos coutumes familiales qui privilégient le lignage maternel, vont jusqu’à placer l’enfant non sous l’autorité de son père mais sous celle de son oncle maternel.
Seule la descendance des filles se trouve intégrée à la famille de leurs mères. Celles des garçons sont absorbées par les lignages maternels de leurs épouses.
Dans les coutumes qui privilégient le lignage paternel, il arrive que l’on puisse observer des anomalies en sens inverse et que des enfants soient abusivement séparés de leurs mères.
L’application inconsidérée de ces principes coutumiers à la vie moderne est à l’origine de graves désordres qui affectent aujourd’hui la vie de nombreux foyers et menacent par contrecoup l’avenir de nos familles elles-mêmes.
En effet, certains pères de famille se trouvent aujourd’hui divisés entre les soins de leurs propres enfants et celui de leurs neveux. Il n’est pas rare de voir l’obligation coutumière qui pèse sur un homme de participer aux frais de scolarité de ses neveux et à l’entretien de la progéniture de ses sœurs en difficultés, priver son épouse et ses enfants du bien être auquel ils auraient pu légitimement prétendre dans sa propre maison.
Le légitime attachement que nous portons à nos coutumes ne doit pas nous empêcher de comprendre, qu’ayant été élaborées dans le contexte économique, social et culturel du passé, elles ne peuvent s’appliquer telles quelles et sans transformation profonde au nouveau contexte économique social et culturel de notre vie familiale présente.
Dans le souci du bien de tous et afin que le meilleur de nos coutumes puisse survivre à cette nécessaire évolution de nos sociétés, nous ne craignons pas d’enseigner en nous référant à l’Évangile et à la doctrine constante de l’Église concernant le mariage des chrétiens, le principe selon lequel, en vertu du plan de Dieu, l’enfant appartient d’abord et avant tout autre considération à la cellule familiale nouvelle constituée par l’alliance de son père et de sa mère. C’est dans le but d’assurer ensemble cette responsabilité que vous vous êtes engagés dans les liens sacrés du mariage chrétien.
C’est donc à la lumière de ce principe fondamental que vous devez vous efforcer de contribuer de manière dynamique et constructive à l’avènement de pratiques familiales nouvelles pour les temps nouveaux.
23. Pour une paternité responsable
Il n’est donc pas admissible parmi nous qu’un père de famille puisse répondre à ses enfants qui font appel à lui pour les besoins de leur entretien : Allez donc voir vos oncles. Ou encore : Débrouillez- vous avec votre famille. Ce genre de comportement choque profondément le cœur de nos jeunes et développe en eux des complexes d’orphelins, de marginaux et d’asociaux et les met dans un climat d’insécurité extrêmement préjudiciable à leur équilibre affectif.
Ce comportement est, en outre, évidemment en contradiction avec la grâce du sacrement du mariage qui fait du couple chrétien, pour ses enfants d’abord, le signe infini de l’amour de ce Dieu que vous devez leur apprendre à appeler Père.
24. Ne séparons pas l’enfant de sa mère
De même et pour les mêmes raisons, il n’est pas tolérable pour nous chrétiens, qu’un conseil de famille, à la suite d’un deuil, d’une séparation ou de la défection de l’un des parents décide du sort des enfants contre la volonté du conjoint demeuré au foyer.
C’est de cette alliance qu’il a reçu la vie, c’est sur elle qu’il doit pouvoir compter jusqu’à sa majorité pour toutes les nécessités de sa subsistance, de sa croissance et de son éducation.
Il est douloureux de constater que de nos jours des mères acceptent facilement d’être séparées de leurs enfants à bas âge, soit pour se soumettre passivement à une décision de famille, soit pour vaquer en toute tranquillité à leurs études, à leurs carrières ou à leurs affaires.
25. Un foyer est une communauté de vie à construire
Époux chrétiens, l’Église et la Société attendent plus que jamais de vous que vous vous placiez ensemble face aux enfants que vous avez mis au monde et à ceux que les aléas de la vie ont confiés à votre sollicitude paternelle et maternelle.
Chacun d’eux attend de votre part une bonne vingtaine d’année de soins attentifs, et tous ensemble ils ont besoin d’habiter votre maison dans un climat d’amour et de paix. Vous devez vous efforcer ensemble de créer avec vos enfants cette communauté de vie, au sein de laquelle ils vont s’initier aux valeurs fondamentales de la vie en société et sur laquelle ils pourront prendre appui pour grandir, étudier, se former une personnalité et se préparer à l’existence.
A la tête de cette communauté éducatrice, nécessaire à la croissance physique, morale et spirituelle de vos enfants, les présences complémentaires du père et de la mère sont indispensables.
Au cours de cette année de réflexion sur la famille, on nous signale de partout comme un véritable fléau social l’absentéisme des parents.
Souvent le père, parfois la mère, rentrent tard au logis, laissant le soin de préparer le repas aux aînés et abandonnant sans surveillance les plus jeunes aux jeux de la rue. Dans ces conditions il n’y a ni contrôle des études ni surveillance des loisirs et des fréquentations des enfants, ni repas pris en commun ni occasion de dialogue entre parents et enfants.
Les parents et les enfants ne se rencontrent plus qu’à l’occasion des conflits qui les opposent. Dès lors, il ne faut pas s’étonner de l’incompréhension qui s’installe entre les générations et de la facilité avec laquelle des jeunes, encore mineurs, garçons et filles de plus en plus nombreux, quittent le toit paternel pour aller vivre où bon leur semble.
26. Faire face aux problèmes de l’habitat en ville
Nous connaissons l’extrême difficulté, pour les plus démunis d’entre nous, de se loger correctement en ville. Certaines clôtures sont aujourd’hui couvertes de maisons mal bâties, surpeuplées et mal aménagées. Il n’y a plus d’espace pour que la famille se retrouve le soir autour du foyer. Dans ces conditions, petits et grands préfèrent vivre dans la rue, dans les bars ou chez des amis plutôt que de rester chez eux dans des conditions d’inconfort, de bruit et de promiscuité rebutantes.
Que faire ? Sommes-nous bien sûrs de ne pas avoir de solutions à apporter à ce grave problème de l’habitat en ville qui rend impossible toute vie de famille ?
- N’y a-t-il pas de choix à faire, des initiatives à prendre avec les moyens du bord pour améliorer le lieu de résidence de votre foyer dans l’intérêt de vos enfants et de leur éducation ?
- Là encore, votre volonté commune de bâtir ensemble une maison qui soit la vôtre et celle de vos enfants est absolument déterminante et nous dirons plus loin combien les membres de famille qui par jalousie ou cupidité font obstacle à de tels projets se rendent coupables aux yeux de Dieu d’un grave péché contre l’institution du mariage et la maison sacrée des époux.
27. Responsables de la première éducation de vos enfants
Votre mission éducatrice, chers parents chrétiens, vous fait aussi un devoir de faire connaître à vos enfants Jésus-Christ et son Évangile, de les initier à la présence de Dieu dans leur vie et à la prière et de les introduire dans la communauté de l’Église à laquelle vous appartenez vous-mêmes.
Ceci suppose en premier lieu que votre pratique familiale soit chrétienne et que la prière, la réflexion, le partage, le pardon, la célébration du dimanche et des grandes fêtes chrétiennes fassent partie de la vie de votre foyer.
Il faut également que les grands événements de la vie familiale, naissance, mariage, deuils, épreuves et joies, soient l’occasion pour vous d’initier vos enfants au mystère de l’amour de Dieu pour nous et à celui de notre mort et de notre résurrection dans le Christ.
Il faut enfin que la pratique de la charité inscrive dans leurs cœurs, la loi de Dieu, telle qu’elle se trouve résumée dans les dix commandements et dans le commandement nouveau laissé par le Seigneur à ses disciples, la veille de sa mort comme un testament très précieux Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.
28. Que les parents chrétiens participent à la catéchèse
Mais, l’âge venu, vos enfants ont besoin de compléter cette initiation familiale par une catéchèse appropriée, qui leur permette d’acquérir une connaissance personnelle des mystères chrétiens et d’y adhérer par un acte de foi personnel et libre. C’est ainsi qu’ils pourront devenir à leur tour source de lumière et de salut pour leurs frères.
C’est dans chaque paroisse sous la responsabilité du Curé que le catéchisme est organisé pour vos enfants.
Mais cette mission de la paroisse ne vous décharge en aucune façon de votre responsabilité de parents chrétiens de transmettre à vos enfants votre foi en Jésus-Christ et en son Église, comme le meilleur des héritages que vous puissiez leur laisser.
Nous devons désormais faire en sorte que, dans chaque paroisse, les parents chrétiens soient associés de la manière la plus étroite possible à l’organisation de la catéchèse.
Enseigner le catéchisme aux enfants, les accompagner dans leur initiation de découverte de la foi, préparer avec eux les étapes de leur accession aux sacrements est, pour les parents chrétiens, en même temps un devoir et une source de grandes grâces. Car en retournant avec leurs enfants aux sources de la foi, les parents renouvellent en eux la grâce de leur baptême et sont appelés à de nouvelles conversions, pour leur plus grand profit spirituel et celui de leur famille.
Parmi les fruits de cette Année de la Famille, nous retenons comme une orientation pastorale nouvelle, que plusieurs ont appelé de leurs vœux, que le catéchisme organisé pour les enfants s’inscrive au cœur du renouveau de notre pastorale familiale.
Ce serait une manière très instructive pour les chrétiens de prendre en ménage la place active et missionnaire qui leur revient dans l’Église, en vertu du sacrement de mariage, qui fait d’eux les associés de Jésus-Christ dans son œuvre de salut.
29. Communautés des foyers chrétiens dans l’Église
Mais, pour que les foyers chrétiens puissent accomplir pleinement cette mission de salut qui est la leur, il faut encore qu’ils s’associent entre eux de toutes sortes de manières au sein de l’Église et de la Société, pour assumer en commun des tâches qui sont les leurs, et qu’ils ne peuvent accomplir si chaque foyer demeure isolé.
C’est ainsi que nous renouvelons de tout cœur notre confiance au Mouvement des Foyers Chrétiens, dans lequel des couples s’associent en vue de se soutenir et de s’édifier mutuellement dans la poursuite de leur idéal de vie conjugale évangélique. Nous approuvons pleinement et encourageons hautement les initiatives prises par ce mouvement tant au plan de l’animation spirituelle des foyers, qu’au plan social, notamment pour la formation des conseillers conjugaux et la promotion des méthodes naturelles de maîtrise de la fécondité.
Mes prédécesseurs et moi-même avons associé avec profit à plusieurs reprises les dirigeants de ce mouvement à notre ministère pastoral pour l’élaboration des principaux documents épiscopaux publiés à ce jour dans notre Diocèse à propos de la famille.
Mais il existe d’autres types d’associations des familles chrétiennes à promouvoir au sein de l’Église. Nous voulons citer tout particulièrement et encourager les communautés chrétiennes de quartier et de village. Au sein de celles-ci en effet, les maisons chrétiennes tissent entre-elles des liens extrêmement féconds de solidarité. Leur réflexion commune et les actions qu’elles décident de mener ensemble peuvent exercer sur tout un village ou sur tout un quartier une influence décisive sur le climat moral dans lequel y grandit la jeunesse.
30. Vos responsabilités de foyer dans la société
C’est en prenant en foyers responsables de l’éducation et de l’avenir de vos enfants votre place active et militante dans l’Église que vous apprendrez à prendre dans la société la place qui vous revient, en qualité d’époux et de parents.
Le nouveau code de la famille promulgué dans notre pays, vous reconnaît des droits et des devoirs que vous devez assumer en toute conscience et responsabilité. Il se démarque par rapport à la coutume en accordant une priorité absolue au foyer conjugal sur la famille clanique traditionnelle. Il serait tout à fait scandaleux que les chrétiens de notre pays fassent obstacle à la mise en application de code en s’accrochant à des pratiques qui se réclament de la coutume alors qu’elles n’en sont que des applications maladroites inopportunes et irréfléchies au contexte radicalement nouveau de la vie moderne.
Il faut que la société civile trouve les foyers chrétiens toujours disponibles, généreux et organisés chaque fois qu’elle fait appel à eux pour le bien des enfants, des jeunes, de la famille ou de la nation.
31. Les parents et l’école
C’est le cas en particulier, lorsque l’école invite les parents d’élèves à participer, au sein des comités, à la gestion des écoles ou à se réunir avec les professeurs ou à s’associer de quelque manière que ce soit à la vie de l’école. Cette participation des parents à la vie de nos institutions scolaires qui ne doit pas se réduire à des retroussons les manches et à des cotisations mais leur permettre d’assumer en lien avec les maîtres leur responsabilité de premiers éducateurs de leurs enfants est extrêmement nécessaire. Nous ne saurions trop encourager les maîtres à faire appel aux parents pour les aider dans leur tâche si pleine de difficultés. Mais il faut en retour que vous, parents chrétiens, ayez à cœur de répondre à leur appel avec dynamisme, intelligence et générosité.
32. Les parents et la collectivité locale
C’est aussi le cas lorsque les chefs de village ou de blocs dans les quartiers de nos villes font appel aux familles les plus conscientes pour prendre en considération les problèmes d’ordre public, de salubrité, de moralité publique et de paix civile qui se posent dans le lotissement dont ils ont la charge. Il serait anormal que ces responsables ne trouvent pas, dans les maisons chrétiennes, le meilleur accueil ainsi que la générosité, l’esprit d’initiative et le sens du bien commun qu’exige la prise en charge de tous les problèmes quotidiens qui touchent si près à la vie de nos familles et à l’éducation de nos enfants.
Frères et sœurs, la meilleure façon de faire respecter ses droits est de se montrer dynamique et vigilant dans l’accomplissement de ses devoirs. Bien des maux, dont nous nous plaignons amèrement en accusant la société et les autres, pourraient en réalité trouver, à notre niveau, une part essentielle de leur solution. Il en est ainsi de l’école et de la moralité publique. Une part essentielle des problèmes dramatiques qui se posent à nos enfants à ces niveaux n’aura de solution que dans une amélioration de l’habitat et de la vie familiale.
Toutes ces choses dépendent principalement de vous, pères et mères de familles, qui avez fait alliance dans le but de construire non seulement votre maison mais en même temps le grand village de notre nation.
33. Couples chrétiens, soyez ce que vous êtes, vivez en couple
Ainsi donc, frères et sœurs, qui par votre union êtes devenus dans notre société les sources de la vie, de l’amour, de la paix, de la justice et du bonheur, toutes les exhortations que nous vous adressons se résument en une seule consigne : Soyez ce que vous êtes, vivez en couple, existez en couple, prenez vos responsabilités en couple, face à vos familles, face à vos enfants, au sein de l’Église et au sein de la Nation.
Pour cela cherchez les forces d’abord dans la grande grâce de votre sacrement de mariage, ensuite en vous regroupant et en vous appuyant les uns sur les autres en Église.
Mais en tout ceci, demeurez devant la face de Dieu, dans sa lumière, dans son amour et faites lui confiance dans les grandes épreuves de la vie.
Le sacrement de mariage intègre votre vie de couple et votre mission de parents dans le grand mystère de notre Rédemption. Unis à Jésus-Christ le Sauveur du monde, vous avez comme lui à porter votre croix, non comme on subit une malédiction mais comme on livre un combat contre le mal et toutes les forces du mal.
Dans ce combat nous sommes vainqueurs grâce à celui qui nous avons cru.
34. Un combat livré pour le salut des jeunes
Ce combat, frères et sœurs, nous ne le livrons pas contre les jeunes mais avec et pour eux.
La vie actuelle les expose à de grandes tentations, de grands dangers et de grandes épreuves. L’incertitude qui pèse sur l’avenir d’un grand nombre d’entre eux jusqu’à un âge avancé est pour eux comme pour nous tous une source de soucis et d’amères préoccupations.
Les parents chrétiens, à l’image de la parabole, doivent laisser leur porte ouverte à l’enfant prodigue et malheureux qui fait appel à eux. Rappelez-vous que votre sacrement fait de vous les témoins d’un Dieu d’amour et de pardon, qui n’abandonne ses enfants ni dans le péché ni dans la souffrance ni dans la mort.
Nous avons déjà attiré votre attention dans notre lettre à propos de l’avortement sur les détresses de tant de jeunes filles marquées dans leur cœur et dans leur corps par des aventures sentimentales et des jeux d’amour qui tournent mal.
Soyons aussi attentifs aux détresses qui ont pour origine l’échec scolaire et l’avenir bouché des jeunes. Trop de jeunes dans notre pays passent les plus belles années de leur vie parfois jusqu’à 25 et 30 ans à tourner en rond dans un système d’éducation de scolarité et d’orientation qui ne débouche pas sur la vie active et responsable dont ils rêvent. Bien souvent ils se plaignent de ne pas trouver chez leurs parents la compréhension dont ils auraient besoin.
Après avoir manqué de fermeté et de diligence à l’égard de nos enfants dans leur jeune âge et leur adolescence, nous les accablons dans leur échec au seuil de l’âge adulte de notre déception, de nos reproches, de notre indifférence et parfois de notre mépris.
Prenons bien garde, frères et sœurs, que la déception de notre jeunesse ne devienne de l’impatience et leur impatience de la colère et qu’ils n’aillent chercher dans la haine et la rancune, les forces qu’ils n’ont pas trouvées dans l’amour et la tendresse de leurs proches.
L’Année de la Jeunesse qui s’ouvre dans notre Diocèse faisant suite à l’Année de la Famille sera pour nous et pour vous, parents chrétiens, l’occasion de réfléchir en profondeur aux problèmes de l’avenir des jeunes afin de prendre encore une fois, face à ce problème dramatique toutes vos responsabilités de parents chrétiens et de communautés chrétiennes.
IV. AUX FAMILLES CLANIQUES
Mais il nous faut maintenant nous adresser à nos familles claniques, telles qu’elles sont aujourd’hui devenues dans notre Congo, à la fin de ce vingtième siècle avec leurs qualités et leurs défauts, leurs richesses et leurs maladies, leurs pesanteurs et leurs potentialités, leur sagesse et leur folie, leurs angoisses et leurs espérances, elles sont que nous le voulions ou non, notre réalité.
En insistant comme nous le faisons tout au long de cette lettre sur le foyer conjugal, sur ses responsabilités, ses devoirs et ses droit imprescriptibles, nous ne cherchons, frères et sœurs, ni à disloquer, ni à détruire notre grande famille africaine. Bien au contraire, nous cherchons à lui ouvrir les voies du salut et de l’avenir et nous avons de bonnes raisons pour cela.
35. Nos familles dépositaires de notre culture
D’abord parce que nos familles sont en définitive les principaux dépositaires de nos traditions, de notre identité et notre culture et qu’à ce titre nous ne pouvons pas souhaiter leur mort mais au contraire leur naissance, sur des bases nouvelles. Nous ne pouvons que féliciter les chefs de famille qui, dans un esprit de service, se consacrent à l’animation de leur lignage, à l’organisation de réunions des familles ferventes, à la prise en charge par la communauté familiale des problèmes, des conflits des épreuves et des détresses de ses membres.
Nous félicitons tout particulièrement ceux qui ont le souci d’intégrer les générations nouvelles et de les initier à la vie de famille, à ses devoirs et à ses richesses. Les jeunes ont un grand besoin de se retrouver au sein de leurs familles, leurs racines, leur fierté et leur identité.
C’est en définitive au sein de la famille que chaque membre de notre communauté nationale se trouve pleinement reconnu, respecté et pris en considération, échappant à l’anonymat de la vie en masse où les plus faibles, les plus âgés, les plus pauvres peuvent être bousculés, piétinés et méprisés sans aucun recours. C’est au sein de la famille que subsiste et se perpétue cette valeur fondamentale de nos coutumes et de notre culture, essentielle pour l’avenir de notre société, le respect de chaque personne humaine.
36. Fonctions sociales de la famille
Mais en outre, il faut signaler avec beaucoup de réalisme le rôle indispensable que continue à jouer dans le fonctionnement de notre société la solidarité familiale traditionnelle. Si, par impossible, demain, dans notre communauté nationale, tous les oncles démissionnaient des responsabilités familiales que leur assignent nos coutumes, la catastrophe serait irrémédiable.
Comment s’effectuerait la rentrée scolaire ?
Qui prendrait en charge les frais individuels de santé ?
Que deviendrait l’énorme masse de jeunes qui se retrouveraient du jour au lendemain privée de domicile, de soutien et de référence sociale. Ne scions pas la branche sur laquelle nous sommes assis.
37. Nos familles claniques et le renouveau des campagnes
D’autres parts, le bien de notre pays, notre développement économique et notre autosuffisance alimentaire exige un nouvel équilibre et une association entre la campagne et la ville. Le renouveau de nos familles et l’instauration d’une nouvelle et intelligente solidarité entre membres citadins et paysans de même lignage est l’une des clés de la remise en valeur de nos terres. Là encore, nous devons féliciter et encourager les familles qui savent organiser la mise en valeur de leurs terroirs, dans un esprit d’initiative économique et de solidarité familiale qui font honneur à nos traditions et sont un gage précieux de notre avenir commun. En revanche, nous déplorons le fait que dans de nombreux villages les anciens découragent les jeunes qui veulent cultiver en mettant toutes sortes d’obstacles et de conditions à leur installation sur les terre familiales.
Nous invitons les communautés chrétiennes à faire révision de vie sur ces problèmes. Que voulons-nous, frères et sœurs, la vie de nos campagnes ou leur mort ?
38. Nos familles et l’unité nationale
Enfin, l’extrême mobilité sociale qui caractérise notre société en voie de modernisation rapide nous fait courir le risque de voir s’établir parmi nous de grandes disparités entre riches et pauvres. Notre chance est que chez nous, chaque famille a ses riches et ses pauvres et que si nous savons maintenir dans la fidélité à nos coutumes la cohésion au-delà de ces disparités de situation sociale et de revenu, nous pouvons faire naître un type de société remarquablement cohérent et bâtir sur la cohésion de nos familles la paix sociale et la cohésion de la nation.
Pour toutes ces raisons, frères et sœurs, nous souhaitons que l’on n’oppose pas l’avenir du foyer conjugal à celui de la famille, mais que l’on comprenne bien que la solidité des foyers est la seule chance, l’unique source de renouvellement et d’adaptation de nos traditions familiales aux temps nouveaux.
C’est pourquoi en nous adressant maintenant aux familles nous leur disons :
Gardez-vous de porter atteinte à la vie des foyers. En détruisant les foyers vous détruisez vos propres enfants et vous vous détruisez vous-mêmes. Mais vous pouvez au contraire, en renouvelant en vous l’antique sagesse de nos pères, contribuer très efficacement à la solidité de nos foyers et par là même au renouvellement de nos grandes familles.
39. La famille clanique peut jouer un rôle dans la conclusion des alliances conjugales (don de conseil)
Même si de nos jours la plupart de couples se forment sans le secours des familles, cela ne signifie pas que celles-ci n’ont plus désormais aucun rôle dans la conclusion des alliances matrimoniales.
L’influence de la famille peut encore s’exercer de plusieurs manières constructives sur le choix que l’un de ses enfants fait d’un époux ou d’une épouse.
Le climat familial demeure déterminant dans ce domaine. Lorsque sa famille est unie et dynamique, un jeune aura tendance à choisir spontanément un partenaire qui lui fera honneur parmi les siens. Mais les parents et ceux qui sont constitués en autorité au sein de la famille, ne doivent pas hésiter à exprimer très clairement leur opposition à une union lorsque, en conscience et pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la mesquinerie, la jalousie, la rancune ou les préjugés de race, de tribu et de caste, elle leur semble d’avance vouée à l’échec. Il est bien important pour l’heureuse conclusion de problèmes aussi délicats que se développe au sein des familles chrétiennes le don de conseil. C’est un don spirituel qui n’a pas été ménagé à nos ancêtres et qui a été répandu par le Christ sur son Église. Ce don nous est offert à condition que nous ouvrions nos cœurs à l’action de l’Esprit Saint et que nous sachions en user, dans un esprit de service et pour le bien.
40. Signification de la dot
C’est aux fiancés eux-mêmes qu’appartient en définitive et en dernier ressort la décision de s’engager dans les liens du mariage. Lorsque cette décision est prise, du moment que les deux fiancés expriment leur intention de satisfaire raisonnablement aux exigences de la coutume, il n’est pas juste que les membres des familles fassent obstacle à la conclusion de leur alliance pour des motifs secondaires de cupidité, susceptibilité, jalousie, rancune, préjugés de tribu ou de caste.
Comment des chrétiens qui se comportent ainsi à l’occasion de la conclusion de l’alliance de leurs enfants, peuvent-ils dans de telles conditions s’approcher du sacrement de l’Eucharistie ?
Faut-il rappeler que la dot, ne doit en aucune façon revêtir le caractère d’un marchandage ? Il s’agit selon la coutume, non pas d’un prix à payer pour l’achat d’un objet mais d’un échange de libéralité entre les familles qui font alliance. La dot devait exprimer, la détermination du jeune homme à s’engager réellement dans les liens du mariage, ainsi que sa reconnaissance envers la famille qui a mis au monde, éduqué et béni celle qui va devenir son épouse.
D’ailleurs qu’il soit bien connu qu’à la générosité du fiancé, la famille de la fiancée ne manque pas de répondre par une générosité égale et qu’en tout ceci, l’objectif principal est l’échange entre les familles de louanges, de bonne volonté et de bénédiction. Rien à voir avec les assauts de vanité, les étalages d’argent et les manœuvres cupides auxquels on se livre dans certaines familles autour de la dot.
En fixant à 50 000 francs le taux exigible pour une dot, le nouveau code de la famille, fait œuvre de justice et redonne à la coutume sa valeur de symbole. Il nous appartient de changer ce symbole de signification chrétienne selon l’Esprit qui est en nous.
Mais les chrétiens qui multiplient les obstacles à la conclusion des alliances conjugales en faisant surgir sans cesse des exigences nouvelles pèchent gravement. On nous a rapporté que dans certaines familles, on augmente le taux de la dot lorsque les futurs conjoints font état de leur intention de se marier à l’Église. Cette conduite est tout à fait indigne de chrétiens.
Lors qu’après plusieurs années de vie maritale et la naissance d’un ou de plusieurs enfants, un couple se décide enfin de célébrer son mariage au sein de la communauté chrétienne, selon la loi de l’Église, nous recommandons instamment aux familles de faciliter de toute manière la conclusion de l’alliance coutumière et le versement d’une dot symbolique. Il est de toute façon inadmissible parmi nous que des parents qui laissent leur fille vivre pendant des années au foyer de leur époux sans se soucier le moins du monde de la conclusion de leur alliance, se montrent exigeants et tracassiers dès lors que le couple exprime le désir de se marier religieusement et de rentrer ainsi dans la pleine communion de l’Église.
Ceux qui se comportent ainsi pèchent gravement contre Dieu, contre l’Église et contre leur propre famille.
41. Que les sœurs ne troublent pas les foyers de leurs frères
Une fois réglées comme il convient, les conditions de l’alliance entre les époux et entre leurs familles, le devoir de chacun dans une famille est d’accueillir le nouveau conjoint comme un vrai frère ou comme une vraie sœur.
Nous devons nous adresser ici tout particulièrement à celles qui sont les sœurs de l’époux. On se plaint de toute part de l’ingérence des sœurs dans le foyer de leurs frères, surtout dans les familles de coutume matrilinéaire.
Trop de sœurs font peser sur le foyer de leurs frères leurs propres échecs dans la vie et considèrent les ressources de celui-ci comme une rente dont elles peuvent disposer à l’envie, pour elles-mêmes et leurs enfants. Elles traitent leur belle-sœur en étrangère et la jalousent ainsi que ses enfants. Elles imposent leurs propres enfants au foyer de leur oncle, exigent au-delà du possible la contribution de celui-ci à l’entretien de leurs enfants, à leur scolarité et à leurs soins en cas de maladie et cela même du vivant du père de ces enfants.
Elles n’hésitent pas, si elles n’ont pas satisfaction à exciter la jalousie de leurs enfants contre le foyer de leur oncle et à faire peser sur lui le soupçon dès lors que sa situation est meilleure que la leur.
Ce comportement détestable des sœurs abusives est le plus souvent à l’origine des dissensions entre oncle et neveux, qui dégénèrent si facilement en malédictions et violences physiques qui sont les plaies de nos familles et retentissent négativement sur l’affectivité des jeunes et l’épanouissement de leurs personnalités.
Cette mise en garde pressante, ne contredit en rien ce que nous avons dit plus haut du devoir de solidarité familiale que les époux doivent exercer ensemble et d’un commun accord et en particulier à l’égard des orphelins.
Ce que nous dénonçons ici, n’est pas la solidarité mais l’exploitation.
42. L’enseignement de Monseigneur Théophile Mbemba à propos de l’héritage
Nous rappelons ici la lettre de notre très aimé et vénéré prédécesseur Monseigneur Théophile Mbemba, sur l’héritage et le sort réservé aux veuves et à leurs enfants dans certaines familles.
Nous avons constaté avec joie que des chrétiens, de plus en plus nombreux font référence à ce très sage enseignement dans le règlement des successions. Leur exemple permet de se faire une idée extrêmement encourageante de ce qui est produit lorsque la sagesse de l’Évangile est apportée au cœur de nos affaires de famille. Alliances renforcées, échanges de bénédictions, paix des Foyers. Au contraire et à notre grande honte, on nous rapporte que les membres actifs de nos communautés chrétiennes continuent à se comporter en cette matière de la manière la plus sordide et ne reculent devant aucun moyen pour dresser le clan maternel des époux contre son épouse et ses enfants afin de mieux les dépouiller. Que ceux qui se comportent ainsi, sachent qu’en devenant à cause de la cupidité et de la méchanceté de leur cœur des sources de malédiction, de haine, de vengeance et de violence, ils se placent eux-mêmes sous la colère de Dieu. Ils appartiennent à la catégorie de ceux dont l’Apôtre Paul nous dit qu’ils ne communient au corps du Christ que pour leur propre condamnation.
Nous attirons l’attention des responsables de paroisses et de mouvements sur le scandale que constitue la présence à des postes de responsabilité dans notre Église de ces suppôts de Satan.
Il convient de leur appliquer ce que nous enseigne l’Évangile de Matthieu de la correction fraternelle. Et que s’ils ne veulent écouter ni leurs frères, ni l’Église, qu’ils soient considérés comme des publicains et des pécheurs et démis de leurs fonctions.
43. Le mari est le chef de son épouse et de ses enfants
Mais il convient d’attirer l’attention de la famille de l’épouse. Elle aussi se doit d’accueillir le nouvel époux comme un membre de famille et de ne pas le traiter en étranger dans son propre foyer, mais bien comme le chef de son épouse et de ses enfants.
Il arrive trop souvent que la maman de l’épouse s’ingère de manière désastreuse dans le foyer de sa fille. Surtout si celle-ci par son travail ou son commerce, parvient à s’assurer un revenu indépendamment de son mari. Il n’est pas rare dans ce cas de voir une épouse récupérée par sa famille, allant jusqu’à bâtir une maison pour elle-même et ses enfants à l’insu de son mari.
44. L’égoïsme de clan
Tous ces comportements malsains ont tous la même origine ; chacun cherche à assurer d’abord et avant toute autre considération ce qu’il imagine être son intérêt et celui de son lignage. Et pour cela tous les moyens sont bons, dénigrement, insinuations mauvaises paroles, malédictions de toutes sortes, de sorte que le système de solidarité familiale, en se repliant exclusivement sur un seul lignage et en se basant sur l’égoïsme et sur la peur finit par se retourner contre la famille elle-même, devenue, non plus un cercle de bénédiction mais un cercle de malédiction.
On ne voit pas qu’en minimisant l’institution du mariage et en relativisant les alliances conjugales par ce jeu mesquin d’intérêts, on a laissé s’introduire dans tout le système traditionnel un vice fondamental qui le condamne à mort en le rendant odieux et absurde.
45. Remettre à jour sur des bases nouvelles notre système de solidarité familiale
Si, au contraire, on replace au cœur de tout le système familial l’alliance conjugale comme réalité première et source fondamentale de tous les droits et de tous les devoirs, alors tout le système de solidarité familiale peut se remettre à fonctionner, sur des bases nouvelles.
Toute famille si grande soit-elle, n’est-elle pas issue d’un couple ancestral ; un papa et une maman, à l’alliance desquels tous les membres de famille font référence, tant dans la solidarité qu’ils pratiquent entre eux que dans les alliances nouvelles qu’ils nouent à leur tour de génération en génération.
Les rôles de la maman et de l’oncle appellent de notre part une réflexion chrétienne approfondie. Les mamans sont les plaques tournantes de nos familles. Elles peuvent selon que leur cœur est généreux ou plein de rancunes et de jalousie, être les grands artisans de la paix au sein de la famille ou, au contraire, nouer des intrigues, répandre le soupçon et semer la discorde.
Les oncles sont encore, dans l’intérêt des foyers eux-mêmes, une mission d’humble autorité et de service à assumer. Ils peuvent être, pour le plus grand bien de tous, les organisateurs et les animateurs de la solidarité familiale. C’est à eux de donner le signal du rassemblement quand il faut sauver un membre de famille en difficulté. Ils peuvent être les gardiens avisés des alliances familiales et les conciliateurs en cas de conflits.
C’est un devoir sacré pour tous les chrétiens constitués en autorité dans nos famille de s’opposer de la manière la plus courageuse aux pressions familiales qui s’exercent sur les couples pour les obliger à se séparer lorsque la stérilité, la maladie ou la mort frappe leur foyer.
Le sacrement de mariage ne met pas les foyers à l’abri du malheur mais il unit étroitement le couple chrétien à l’œuvre du salut du monde en Jésus-Christ. C’est leur amour, don de l’Esprit Saint à leur foyer, qui peut permettre aux époux chrétiens de surmonter les épreuves et de surmonter de la stérilité, de la maladie et de la mort.
Telle est notre foi, et nous devons, frères et sœurs, y conformer notre conduite.
Les fonctions traditionnelles au sein de la famille n’ont rien perdu de leur actualité et peuvent être assumées dans un esprit chrétien, c’est-à-dire un esprit de service, de justice et de paix.
De même que nous avons à réfléchir en chrétiens à la vie des foyers et au comportement que chacun doit adopter dans une maison chrétienne, de la même façon et avec les mêmes exigences évangéliques nous devons réfléchir en chrétiens à nos comportements en famille.
Quand au contraire on met l’autorité familiale au service de la jalousie, de la cupidité, de la rancune et du mauvais vouloir, elle ne peut qu’engendrer en chaînes toutes sortes de malédictions. Or, frères et sœurs, nous avons été baptisés dans la mort et la résurrection du Christ pour devenir sources de vie et non de mort, source de salut et non de malheur, source du bien et non du mal.
46. La pratique familiale des sacrements
Toute pratique familiale des sacrements peut nous y aider. Ceux-ci doivent devenir, peu à peu, les actes fondamentaux de nos vies et les sources inépuisables de la bénédiction jaillissant de la vie de nos familles renouvelées et transfigurées par l’Évangile.
a) Le sacrement de mariage comme source de la vie et de l’amour.
b) Le sacrement de baptême qui rassemble les membres de la famille pour accueillir dans la vie nouvelle, ceux que Dieu a choisis pour qu’ils soient, dès ici-bas, les membres de Jésus-Christ, lumière dans les ténèbres de ce monde, ouvriers de la paix et messagers de l’Évangile pour le salut de leurs frères.
c) Le sacrement de la réconciliation, commue source de purification et de paix, pratiqué inlassablement pour combattre le péché qui ruine nos familles et la discorde qui les disperse. Nous devons apprendre à insérer ce sacrement si puissant et si riche de grâces dans le processus coutumier de nos réconciliations familiales.
d) Le sacrement des malades, qui rassemblent les familles autour de leurs membres souffrants afin de les réconforte ; de les guérir et lorsque le temps est venu, de les accompagner jusqu’au seuil de notre village terrestre, confiant dans l’amour du Père qui a ressuscité Jésus-Christ d’entre les morts et qui nous attend dans l’éternité.
e) Le sacrement de 1’Eucharistie, qui rassemble toutes les familles chrétiennes au sein de la Grande Église répandue sur toute la surface de la terre et qui fait de nous un peuple nouveau, ce peuple que Dieu s’est choisi, pour témoigner dans l’histoire qu’il a tout créé par amour et qu’il a formé le dessein de tout réconcilier dans l’amour par Jésus-Christ, son Fils, Notre Seigneur.
La pratique familiale de cette vie sacramentelle si riches en grâces de toutes sortes, exige de nous, frères et sœurs, que nous renoncions à la pratique de tous les maléfices, malédictions, sortilèges, mauvaises paroles pour devenir en toutes circonstances pour nos familles sources de bénédictions, de réconciliation, de guérison et de salut, obéissant à la parole de l’Apôtre Bénissez, ne maudissez pas !
Alors la famille peut redevenir dans les temps modernes ce qu’elle a été dans le passé, la grande chance de notre société. Que de ressources pour l’éducation de nos enfants, leur initiation à la vie et aux réalités de notre nation et pour leur orientation, que nos grandes familles étendues et diverses, chacune étant à elle seule comme une petite nation répartie sur la ville et sur la campagne entre l’université et les ateliers artisanaux, entre la fonction publique, les entreprises et le commerce, riche de la science des uns et de la sagesse des autres.
Puissions-nous, frères et sœurs, être au sein de nos familles les liens de la charité, les sources de la vie et du bonheur au nom de Jésus-Christ, notre Seigneur !
V. AUX JEUNES GENS ET JEUNES FILLES
A vous, jeunes gens, garçons et filles, nous devons nous adresser maintenant : Nous avons écrit cette lettre en pensant surtout à vous. La famille a été instituée selon la volonté de Dieu par la sagesse des anciens, pour vous permettre de naître, de grandir et de vous préparer à prendre à votre tour vos responsabilités.
Sur vos générations pèsent en même temps un lourd handicap et une grande responsabilité.
47. La jeunesse aujourd’hui manque de modèles
Un lourd handicap, car pour le plus grand nombre d’entre vous, vous n’avez plus sous les yeux de modèles que vous puissiez imiter. Couples désunis, néo-polygamie anarchique, délinquance sexuelle des adultes, sont autant de mauvais exemples qui attirent votre jeunesse sur des chemins sans issues.
Ainsi, dès l’adolescence, vous êtes incités à vous initier à la vie sentimentale et aux activités sexuelles, en dehors de toute sagesse, sans informations solides, sans conseillers, sans foi, ni loi.
L’amour devient pour vous un jeu, dans lequel, vous perdez le respect de vous-mêmes, vous mettez en danger votre santé, vous gaspillez l’énergie et le temps de votre jeunesse et vous compromettez votre avenir et celui de la famille. En effet, dans ce jeu, vous perdez le sens de l’amour véritable, le sens de la vie, celui de la responsabilité et de la vraie liberté.
Personne n’a plus le courage de vous annoncer une vérité pourtant très simple et très certaine.
Le temps de la jeunesse est de préparation à la vie, un temps de générosité où il est nécessaire pour la formation de vos personnalités que vous fassiez courageusement cette expérience de la solitude dans laquelle chacun de vous peut prendre possession de lui-même, forger sa propre personnalité et consacrer toutes ses énergies au développement de son intelligence, de ses forces physiques, de ses dons artistiques, de ses aptitudes manuelles, de sa vie spirituelle, tout en faisant au sein des groupes auxquels vous appartenez l’apprentissage de la vie en société.
Cette solitude est liée à votre condition de célibataires. Elle implique que vous preniez la place qui est votre place de jeunes, au sein de votre famille, au sein des groupes des jeunes auxquels vous appartenez, au sein de l’école où vous vous instruisez, au sein de l’Église dans laquelle le Seigneur vous a appelé et au sein de la communauté nationale qui est la vôtre.
Les pseudo-couples que vous formez de manière anarchique et provisoire, vous lient à des responsabilités prématurées et vous bloquent dans de fausses situations qui neutralisent le meilleur de vos énergies.
Ces paternités et ces maternités précises, ces pseudo-droits que vous vous donnez sur la vie de tel jeune homme ou de telle jeune fille et les pseudo-obligations qui en découlent, entravent abusivement et inutilement ce qui devrait être votre authentique liberté de jeunes.
Ce faisant, vous gaspillez du temps, des énergies et une disponibilité intérieure que vous devriez pouvoir consacrer entièrement à la préparation de votre avenir et l’animation culturelle et spirituelle de votre génération.
48. Vous pouvez décider de faire renaître la famille
Nous vous invitons, au cours de cette Année pastorale de la Jeunesse qui s’ouvre, à mener une réflexion en profondeur, afin qu’avec l’aides du Seigneur, à la lumière de l’Évangile vous remettiez votre jeunesse sur un chemin d’avenir.
Le Pape vous l’a rappelé à plusieurs reprises au cours de cette Année internationale de la jeunesse.
Votre responsabilité est considérable. Songez-y : Quel avenir voulez-vous pour vos familles ? Croyez-vous que les désordres actuels dont vous êtes les premières victimes peuvent se perpétuer indéfiniment ? Voulez-vous que vos enfants souffrent à leur tour ce qu’un si grand nombre d’entrevous avez souffert ?
Mais, si vous le voulez, vous pouvez décider joyeusement de rompre avec le péché et la délinquance et préparer la renaissance de votre vie familiale, dans la pureté, la justice, l’amour et la vraie liberté.
VI. AUX OUVRIERS APOSTOLIQUES
C’est à chacune de nos paroisses et de nos communautés chrétiennes et tout particulièrement à leurs responsables prêtres, religieux et laïcs que nous voulons nous adresser maintenant pour conclure.
L’Année pastorale que nous venons de vivre nous a permis de prendre une plus vive conscience des problèmes qui se posent à nos familles et des responsabilités propres de notre Église face à ce problème.
Mais nous ne sommes pas encore en mesure de définir une véritable pastorale de la famille dans ses contours. C’est précisément ce travail là qu’il nous reste à accomplir, tous ensemble, en unissant nos compétences, nos expériences et notre zèle pastoral.
Cette recherche doit se développer selon les grands axes suivants :
a) En premier lieu, la préparation au sacrement de mariage. Par paroisse et par zone, il nous faut mettre au point un service d’accompagnement des couples en cheminement, désireux d’insérer leur foyer dans la pleine communion de l’Église.
Il nous faut aussi un service de fiancés chrétiens. Des jeunes issus de nos mouvements les plus fervents commencent en effet à décider de vivre leurs fiançailles en pleine conformité avec les exigences de l’Évangile. Ils doivent trouver dans l’Église, le conseil, l’accompagnement et la nourriture spirituelle dont ils ont besoin.
C’est grâce à leur générosité que nous pourrons faire renaître parmi nous la pratique des fiançailles chrétiennes, si essentielles au renouveau de nos alliances conjugales dans l’esprit de Jésus- Christ.
b) En deuxième lieu, la catéchèse dans notre Diocèse doit retirer de nos réflexions de cette année deux grandes orientations nouvelles. Il faut insérer dans la démarche catéchétique elle-même une solide catéchèse sur la famille, sur les pratiques chrétiennes en famille, prière, réconciliation, dialogue, repas, bénédiction, fiançailles et mariage, deuils et fêtes, célébration familiale des sacrements et par dessus-tout pratique de la charité.
Cet enseignement, joint au développement des vertus familiales, constituera la meilleure et la plus fondamentale préparation des nouvelles générations à leurs futures responsabilités d’époux et de parents.
Mais ceci n’est possible que si nous décidons de tout faire pour associer de toutes sortes de manières les parents à la catéchèse. Qu’ils soient instruits de la manière d’assurer en famille la première initiation chrétienne des enfants. Qu’ils participent à l’organisation du catéchisme dans la paroisse, qu’ils soient associés par des réunions soigneusement préparées à la démarche catéchétique de leurs enfants.
c) En troisième lieu, il faut que, de plus en plus, les foyers chrétiens s’engagent, autant que possible, en couples dans la vie de nos communautés. Nous devons pour cela attacher la plus grande attention aux communautés de foyers, aux communautés de village et de quartier, qui réunissent les couples et les engagent en tant que couples dans une action apostolique.
d) En quatrième lieu, il nous faut instaurer au sein de nos paroisses un véritable service des familles chrétiennes : Écoles des parents, Conseil familial, Conseil conjugal, service des malades et service de la réconciliation, service des détresses familiales...
Pour cela, il nous faut développer à tous les niveaux de véritables compétences, jointes aux dons spirituels de sagesse et de conseil.
Les couples doivent pouvoir compter sur les institutions paroissiales pour les aider à apaiser leurs querelles et à trouver une issue à leurs conflits.
Notre Église a besoin de sages conseils (conseil de sages), prêtres, religieux et laïcs qui soient pour ces temps nouveaux de véritables experts de la coutume chrétienne et les artisans de la paix dans nos familles.
e) En cinquième lieu, nous en appelons à nos fraternités féminines. L’apostolat des femmes au sein des familles a toujours été tout au long de l’histoire de l’Église, une source extraordinaire de grâces et de conversion. Que les femmes qui se sont si bien organisées en communautés chrétiennes consacrent le meilleur de leur activité à réfléchir aux problèmes familiaux et à s’y engager.
Conclusion
Frères et sœurs, une grande espérance s’est levée dans nos cœurs, durant cette Année de la famille. Nous avons levé les yeux sur notre avenir. Nous avons entendu l’appel du Seigneur à nous renouveler dans l’Esprit de Jésus-Christ qui a été répandu dans nos cœurs. Mettons-nous donc au travail.
La famille est, par excellence, ce champ que le Seigneur nous confie pour que nous le labourions, le plantions et y jetions la bonne graine. N’épargnons pas notre peine. Le temps de la récolte viendra pour nos enfants et ils nous béniront dans les siècles d’avoir semé la Bonne Nouvelle du salut, l’Évangile de Jésus-Christ sur notre terre.
Lettre Pastorale, année 1984 – 1986
Brazzaville, le 11 Février 1986